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Bois de Païolive en Ardèche : Site sensible et onirique

Bois de Païolive en Ardèche : Site sensible et onirique

Unique en son genre, la forêt de Païolive est aussi minérale que végétale. Ses reliefs accidentés ont créé une nature quasi intouchée où se rencontrent des espèces rares. Bienvenue dans le labyrinthe énigmatique du « bois des fées ».

Accessible en toute saison grâce à plusieurs sentiers bien balisés, le bois de Païolive offre 2 000 hectares de forêt toujours verte. Elle abrite notamment une extraordinaire diversité de mousses qui bénéficient d’une humidité permanente, liée au relief très particulier de cette forêt. Païolive est en effet accroché à un lapiaz, c’est-à-dire une vaste dalle calcaire que le vent et la pluie ont transformée en labyrinthe minéral au cours du temps. « Ce relief entraîne la présence de centaines de cavités où l’eau s’infiltre et maintient une humidité élevée », explique Tanguy Coste, gestionnaire du site. Plusieurs centaines d’espèces de mousses ont été recensées, notamment la mannie à trois andrécies, désormais protégée car longtemps considérée comme disparue.

Un couvert forestier ancien

Tanguy Coste compare le sous-sol de Païolive à un « gruyère » et prévient : mieux vaut rester sur les sentiers balisés car vous risqueriez de chuter ! Mais ne ratez pas les superbes points de vue sur les gorges du Chassezac, une rivière qui a creusé le calcaire de Païolive. Ce relief accidenté a préservé la vie au cours du temps, comme le raconte Tanguy Coste : « Les coupes de bois étant compliquées à réaliser, il y a toujours eu un couvert forestier, d’où une grande biodiversité ». C’est ainsi que cette forêt est la seule en France à accueillir une population importante de grande cétoine bleue, un coléoptère inféodé aux vieilles chênaies et à la couleur rare dans le monde animal. En 2018, une nouvelle espèce d’insecte a même été découverte, le staphylin de Païolive : de taille millimétrique, il vit dans le sol.

« Alors que sur le reste du pourtour méditerranéen, les autres forêts ont été régulièrement exploitées ou brûlées, ce bois a été préservé », insiste Tanguy Coste. Il ajoute que Païolive n’a jamais été aussi étendu du fait de la déprise agricole, suite à laquelle plus aucun prélèvement de bois n’a eu lieu. Cependant, le peuplement forestier est relativement jeune, car en constant renouvellement. « Les chênes ont généralement moins de 100 ans, à l’exception de quelques spécimens de plus de 200 ans : poussant dans des failles rocheuses, ils ont peu de substrat terreux et lorsqu’il y a du vent, ils tombent facilement car ne disposent pas d’un enracinement profond », explique le gestionnaire. Le chêne pubescent règne en maître dans cette forêt ancienne. Cette espèce de quercus, très répandue en Ardèche, garde ses feuilles en hiver : on les dit « marcescentes » car elles sèchent à l’automne mais restent fixées sur l’arbre jusqu’au printemps, attendant la pousse du nouveau feuillage.

D’autres arbres se plaisent dans le labyrinthe minéral de Païolive, à commencer par le chêne vert, qui doit son nom à la persistance, même en hiver, de ses feuilles. En saison froide, difficile de rater le cornouiller sanguin dont l’écorce rouge vif illumine le sous-bois. Dans les endroits plus frais et ombragés, on rencontre l’alisier torminal, aussi appelé alouchier : ses feuilles font un peu penser à celles d’un érable et ses fruits sont comestibles blets, avec une saveur acidulée et sucrée. Observez aussi le cerisier de sainte Lucie, ancêtre des cerisiers cultivés, ainsi que l’érable de Montpellier, le tilleul à grandes feuilles, le pistachier térébinthe et le genévrier cade.

Les sept lianes de Païolive

Le sous-bois est tapissé de lierre, dont la floraison hivernale est précieuse pour les abeilles en cette saison. À Païolive, certains pieds deviennent aussi épais que des troncs d’arbres ! Le lierre est l’une des sept lianes du bois avec la clématite, la salsepareille, le tamier, la garance voyageuse, la vigne sauvage et le chèvrefeuille d’Étrurie. On croise aussi le fragon petit-houx, porteur de baies d’un rouge vif qui persistent tout l’hiver : ces baies sont toxiques, mais les jeunes pousses terminales sont comestibles comme des asperges sauvages. Débusquez le cétérach officinal, une fougère dont les fructifications sont visibles sous les feuilles en hiver. Malheureusement les buis ont disparu : « ceux-ci furent ravagés par la pyrale en seulement deux ans », raconte Tanguy Coste. Le gestionnaire signale aussi la présence, en lisière, d’une espèce considérée comme invasive : l’ailante. Cet arbre produit de l’ailanthone, une substance qui limite la croissance des plantes alentour, d’où son expansivité. Il fut introduit en Ardèche pour la sériciculture car il abrite un papillon dont la chenille produit un fil de soie.

Le bois de Païolive est aussi remarquable pour la diversité de ses lichens – environ 400 espèces sont recensées. Pour toutes les richesses qu’elle recèle, cette forêt est classée Espace naturel sensible (ENS) et Natura 2000, outil essentiel de la politique européenne de préservation de la biodiversité. « Ce type de symbiose entre le minéral et le couvert végétal est rare ; même dans le Larzac, qui est aussi un plateau calcaire, il n’y a presque plus de forêt », commente Tanguy Coste. à Païolive, que les locaux appellent le bois des « fados », le bois des fées, restez donc discret pour ne pas perturber cette nature exceptionnelle. Peut-être que les impressionnants blocs calcaires aux formes énigmatiques vous révéleront alors leurs secrets : le rocher de l’ours et du lion, qui sont dressés l’un contre l’autre depuis des millénaires, sont-ils en train de s’affronter ou de s’étreindre ?

Le cerisier de sainte Lucie, Prunus mahaleb

Ce cerisier sauvage est assez commun autour de la Méditerranée (lire aussi l’article de François Couplan, n° 215). Il produit une petite cerise trop amère pour être consommée. Mais le noyau qu’elle contient peut être réduit en poudre pour devenir une épice dont le parfum rappelle celui de l’amande amère, avec des notes de cerises et de foin. Elle est principalement utilisée dans les desserts au Proche-Orient et au Maghreb.

Le cétérach officinal, Asplenium ceterach

Cette fougère à feuilles persistantes forme des rosettes denses. Elle est commune dans les fentes des rochers et dans les vieux murs calcaires. Le cétérach officinal a été utilisé à des fins médicinales pour ses propriétés pectorales. C’est aujourd’hui une plante ornementale à cultiver à l’ombre sur une terrasse ou en rocaille.

Infos pratiques

Comment y aller : Depuis Les Vans, à 25 km de la gare de Villefort, prendre la D901 vers Banne. à environ mi-distance de Banne, prendre la D252, et suivre le panneau « Bois de Païolive ».

Itinéraire : Dépasser le premier parking (l’Ours et le Lion) et se garer au second (les Clairières). Trois circuits sont proposés. La Vierge (balisé en vert) serpente entre les rochers sur 1,5 km. Saint-Eugène (balisé en bleu) est une boucle de 4,5 km en forêt et surplombe les gorges du Chassezac. La Corniche (balisé en jaune) permet d’admirer la rivière Chassezac d’en haut (4 km).

Plus d’informations : Office de tourisme Cévennes d’Ardèche : Cevennes-ardeche.com et association Païolive : Bois-de-paiolive.org

Se loger : Chambres d’hôtes Les Loups dans la bergerie à Banne, à partir de 65 € (2 pers.). Tél. : 04 75 89 98 53. Lesloupsdanslabergerie.com

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Plantes & Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.
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