Le charbon binchotan, diamant noir du Japon
Véritable charbon végétal issu d'une tradition fascinante, le binchotan filtre l'eau du robinet et la reminéralise lorsqu'il est plongé dans une carafe. Il est fabriqué à la main dans le sud du Japon, à partir du chêne vert, selon une méthode ancestrale transmise de génération en génération par les maîtres brûleurs.
En tant qu’arrière-petite-fille de mineurs en Bourgogne, quand j’entends parler de charbon, les associations qui me viennent ne sont pas très heureuses : Révolution industrielle, exploitation, grisou, silicose, incendie, effondrement, pollution… Alors quand je vois un petit bâton de charbon apparaître dans une carafe… je me montre méfiante. C’est pourtant une expérience à laquelle j’ai été confrontée avec l’arrivée de ma mère chez moi, enfin dans ma cuisine. En plongeant un morceau de charbon de bois dans mon eau, elle espérait que j’en apprécie la soudaine qualité. Le binchotan ne provient-il pas d’une tradition ancestrale japonaise, où il est fabriqué depuis de nombreux siècles ?
Une origine et un procédé de fabrication contrôlés
Ancienne infirmière créatrice de la boutique en ligne « Le vrai binchotan », Pamela Marchand s’approvisionne justement au sud du Japon, là où est produite la version traditionnelle du charbon végétal. « C’est une appellation réservée au charbon végétal japonais fabriqué à partir du bois de chêne vert, l’ubamegashi, réputé car très dense et lourd, qui coule dans l’eau. Cet arbre pousse à l’état sauvage dans seulement trois régions, Kishu, Tosa et Miyazaki, où il est protégé par des maîtres brûleurs de la compagnie forestière japonaise garantissant qu’il ait atteint l’âge de vingt ans avant d’être élagué et son bois transformé dans les règles de l’art. » Le binchotan est ensuite fabriqué sans agents chimiques, par cuisson lente des branches dans des fours en terre, et par leur « activation » à la vapeur d’eau, fours ouverts. Les maîtres brûleurs se relaient nuit et jour pendant quinze jours autour du brasier, effectuant des rotations toute l’année, y compris pendant les grosses chaleurs en montagne. L’appellation binchotan certifie une teneur en carbone de 90 % minimum (ce qui le rend très proche du diamant, qui contient 99 % de carbone) et une porosité importante. Son procédé de carbonisation traditionnel est classé « trésor national », si bien qu’il suscite les convoitises. Il est à ce titre repris par d’autres exploitants dans le monde. Au Vietnam par exemple, on produit un charbon végétal issu d’eucalyptus cultivés et...
présentés comme bio, s’appropriant le nom de binchotan du fait d’une « fabrication à la japonaise ».
Il attire les polluants comme un aimant
La principale propriété du binchotan est sa capacité d’adsorption, c’est-à-dire qu’il attire à sa surface, comme un aimant, certains polluants contenus dans l’eau dans laquelle il est plongé. Le binchotan du Kishu bénéficie d’une vignette d’authenticité – un sticker rond et jaune – délivrée par la coopérative charbonnière de la préfecture de Wakayama, qui contrôle systématiquement son taux de carbone avant de l’exporter.
Afin de s’assurer de ses propriétés, Pamela Marchand a décidé de confier à un laboratoire spécialisé des échantillons de son eau du robinet (de ville), qui ont été analysés avant et après mise en présence du binchotan. Conclusion, l’eau filtrée avec le binchotan montrait notamment une diminution considérable de sa quantité de plomb (venu de certaines canalisations), une réduction de sa teneur en aluminium ainsi qu’une plus grande douceur. Par ailleurs, il a pu être démontré que le binchotan ne relarguait pas de pesticides. « Et ce n’est pas tout ! Si le binchotan a le pouvoir de neutraliser le mauvais, il a aussi celui de restituer le bon. Les eaux analysées montrent en effet une augmentation de la présence des minéraux tels que le cuivre, le zinc et le potassium… Quant au calcium, présent dans l’eau naturellement, il est préservé. Il faudrait une vie pour percer le mystère du binchotan ! », conclut notre passionnée.
Quant à ma carafe d’eau, je la mets précieusement de côté avec le charbon végétal d’origine inconnue que ma mère y a plongé, et je double l’expérience avec le binchotan envoyé par Pamela dans une deuxième carafe. Je dois avouer que je ne sens pas de réelle différence entre les deux eaux au niveau du palais. En revanche, quand je bois celle du binchotan, j’ai l’impression de plonger dans toute une histoire…
Et le charbon végétal français ?
Alexandra Polya, fondatrice de la société Bijin, spécialisée dans le charbon végétal et actif (binchotan, takesumi…), a cherché le moyen de faire produire « français ». C’est dans l’Yonne, à Arthonnay, qu’elle a trouvé Gabriel Taviot, scieur spécialisé en bois précieux et héritier de la dernière entreprise française de fabrication traditionnelle de charbon. Il cuit son bois à l’étouffée, sur une meule en terre pouvant atteindre 1 200 degrés. Il obtient ainsi du charbon végétal français à partir de manches défectueux (pioches, balais…) en bois de charme, de hêtre ou de frêne. Les résultats d’analyse de l’eau du robinet après filtration par ce produit made in France sont d’ailleurs comparables à ceux d’une eau filtrée par le binchotan. Gabriel Taviot le vend tous les ans à des Japonais pour la cérémonie du thé en France. « Les différences entre le charbon végétal français et le binchotan ? Le français est issu d’un circuit court, et il reste à la surface de l’eau dans les carafes, car il est léger. Il finit cependant toujours par couler, un peu comme le bâton de charbon de bambou », conclut Alexandra.
Recettes de Mère Nature
Comment utiliser le binchotan… et le recycler ?
Bien filtrer l’eau
Selon la qualité de votre eau, optez pour une quantité de binchotan adaptée :
- 20 g par litre si votre eau est de bonne qualité et a un goût agréable.
- 30 g par litre si elle est de qualité moyenne et possède un léger goût de chlore.
- 40 g par litre si le goût de chlore est très prononcé.
Note : Ne pas dépasser la dose de 50 g de binchotan par litre d’eau.
Après avoir lavé et brossé les bâtons de binchotan pour enlever la cendre conservatrice qui les enrobe, faites bouillir 15 minutes dans une quantité d’eau les recouvrant afin de les stériliser, puis laissez sécher. Plongez-les ensuite dans une carafe d’un litre en verre pendant 8 heures minimum, ou toute une nuit, et laissez-les en place en prenant soin de renouveler l’eau toutes les 48 heures maximum. Stérilisez le binchotan tous les mois. Après six mois d’utilisation, il doit être remplacé, car il n’est plus efficace dans l’eau, mais vous pourrez le recycler (voir ci-dessous).
Pour une nouvelle vie
Une fois que votre binchotan a dépassé sa période d’utilisation dans l’eau, vous pouvez le faire sécher puis l’utiliser comme purificateur ambiant afin de neutraliser les mauvaises odeurs et absorber l’excès d’humidité dans différentes situations :
- dans votre frigo, dans un récipient en verre ouvert.
- dans votre placard à chaussures, voire directement dans une paire de chaussures.
- dans vos toilettes, ou toute petite pièce un peu humide, sous forme de bâtons entiers ou brisés en petits morceaux dans une coupelle.
- près de vos compteurs électriques pour minimiser l’impact des ondes électromagnétiques, car le binchotan, riche en carbone, agit comme la shungite.
- dans votre panier de fruits, pour en allonger la durée de vie.
- comme engrais de jardin, sous forme brisée.
- dans votre composteur.
- et même sous forme de bijoux, comme au Japon.