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Salicorne, criste-marine : les petites salades du littoral

Salicorne
Salicorne

Les plantes marines poussent entre deux mondes : attachées à la terre par leurs racines, elles captent dans leurs feuilles le sel de la mer. Salicorne, criste marine, obione et roquette de mer apportent à l’organisme de précieux apports en iode et sels minéraux. Depuis des siècles, on apprécie leur saveur subtile et leurs propriétés digestives.

Les plantes qui poussent en milieu salin sont connues sous le nom de plantes halophytes. On les confond parfois avec des algues, mais les différences sont de taille. Ces plantes possèdent des racines, ont de la sève et fleurissent. Contrairement aux algues, qui n’ont ni racine, ni sève, ni fleur. Les premières tirent leurs nutriments du sol où elles poussent ; les algues, elles, captent les nutriments directement dans l’eau de mer. Les plantes maritimes ont cette particularité d’être à la fois de terre, par leurs racines, et de mer par l’eau salée qu’elles captent dans leurs feuilles.

La salicorne, sans conteste la plus connue, pousse directement dans des grèves salées, baignée régulièrement dans l’eau de mer. Son nom lui provient d’ailleurs – semble-t-il – de ses extrémités cornues et salées. L’obione et l’aster maritimes, ses voisines de grève, sont moins connues, mais tout aussi iodées. Un peu plus haut se dressent la criste-marine, au milieu des pierres (d’où son surnom de « perce-pierre ») et encore plus loin de l’eau la roquette de mer et la bette maritime. Ces dernières sont caressées par des embruns, tandis que les premières sont régulièrement rincées par l’eau de mer. On devine lesquelles sont plus salées et plus iodées que les autres.

Indispensable à notre organisme, l’iode permet à notre thyroïde de fabriquer ses hormones de régulation. En passant dans le sang, l’iode est capté par cette glande en forme de papillon, qui peut alors fonctionner. Rappelons que la thyroïde est également impliquée dans  la stimulation de la consommation d’oxygène, la température du corps, le rythme cardiaque, le système nerveux et la régulation du métabolisme (d’où son importance pour le maintien du poids). Elle intervient également dans les performances mentales ou physiques, la fatigue et même la digestion.

Les plantes maritimes apportent donc beaucoup d’iode, mais aussi des sels minéraux, notamment du magnésium : elles le concentrent dans leurs feuilles grâce à leur chlorophylle et elles le reçoivent par les embruns ou directement par l’eau de mer. En somme, ces plantes apportent une double dose de ce minéral. Celuici intervient dans de nombreuses réactions enzymatiques intracellulaires, participant à la transmission neuromusculaire de l’influx nerveux et agissant comme un puissant anti-stress naturel. Or, nous sommes nombreux à être carencés en magnésium, notamment les femmes.

La criste-marine est connue depuis longtemps pour ses qualités digestives et stimulantes. C’est un dépuratif du foie aux vertus tonifiantes. On lui prête des propriétés vermifuges, diurétiques et apéritives. Un peu plus éloignée du bord de mer, la roquette n’est pas en reste pour la vitamine C. Poussant sur les sentiers du littoral, elle est rafraîchie par les embruns et capte aussi l’iode. Plus puissante en goût que sa cousine des jardins, la roquette de mer favoriserait elle aussi une meilleure digestion. Toutes ces plantes maritimes étaient jadis embarquées sur les navires pour lutter contre le scorbut et l’anémie.

Moins connus, la bette, l’aster et l’obione sont tout aussi agréables à découvrir. La bette maritime, ancêtre de nos betteraves, se trouve en général en haut des dunes qui limitent l’estran, enracinée dans le sable. Comme les épinards, elle est reconnaissable à ses larges feuilles vertes et brillantes que l’on consomme telles quelles en salade, coupées en lanières. Une petite cuisson peut l’adoucir. On lui attribue des vertus émollientes et laxatives utiles contre la constipation et l’inflammation des voies urinaires. La feuille écrasée était autrefois utilisée pour soigner les croûtes de lait et les dartres.

L’aster maritime, surnommé « oreille de cochon » à cause de ses feuilles charnues, se déguste jeune et...

croquant. Son goût iodé rappelle celui de la salicorne. On reconnaît de loin l’obione faux-pourpier aux reflets argentés de ses feuilles, qui peuvent la faire confondre avec les siliques plates de la monnaie du pape. En s’approchant, on remarque toutefois d’importantes différences : feuilles plus petites, plus vertes, nettement en forme de petite cuillère. Les vertus de l’aster et de l’obione, encore peu connues, gagneraient à être étudiées ! La plupart des plantes maritimes sont, comme leurs cousines des jardins, plus savoureuses au printemps et en début d’été. Attendre la fin de l’été ou l’automne, c’est prendre le risque de ramasser des plantes ligneuses et fibreuses, au goût plus fort et surtout plus difficiles à cuisiner. Récoltez les plutôt avant la mi-juillet en respectant la réglementation en vigueur dans chaque région. Prenez soin de vous chausser convenablement pour les plantes les plus proches de l’eau (salicorne, obione, aster…) et assurez-vous du terrain où vous souhaitez aller les récolter. Leurs endroits de prédilection sont souvent proches de vasières et l’on a déjà vu des cueilleurs s’y enfoncer alors que la marée montait… Munissez-vous d’une bonne paire de ciseaux pour couper les extrémités (les bouts salés des salicornes ou les feuilles des asters) et d’un panier.

Pesto du bord de mer - POUR 4 PERSONNES

Ingrédients
• 100 g de fromage nature à tartiner
• 100 g de roquette sauvage
• 50 g de salicorne
• 50 g de noisettes en poudre
• 1 petite cuillère de gingembre frais, râpé
• 2 cuillères à soupe d’huile de noisette
• 2 cuillères à soupe d’huile de pépins de raisin
• Quelques pépins de courge grillés

Préparation
1. Rincer et découper finement la roquette et la salicorne.
2. Hacher finement les graines.
3. Mélanger dans un saladier, le fromage, les herbes, les noisettes et le gingembre râpé.
4. Ajouter l’huile jusqu’à l’obtention de la consistance souhaitée.
5. Parsemer de pépins de courges grillés.

Mode d’emploi - En salade

La plupart de ces plantes seront bien meilleures crues que cuites : on les ajoutera aux salades de saison. En évitant la cuisson, elles conservent mieux leurs vitamines et sels minéraux. Comme les moutons de pré salé, toutes ces plantes apporteront une note iodée à vos plats. La roquette, forte comme les légumes sauvages, sera ajoutée avec parcimonie, tandis que la salicorne ou l’aster peuvent constituer une belle part dans une salade. Goûtez la criste-marine avant de l’ajouter : ses notes citronnées ou anisées peuvent ne pas plaire à tous les palais. Quelques touches seulement peuvent suffire dans une salade composée.

Cuisson et séchage
On peut se contenter de poêler la salicorne ou l’obione pour les déguster avec un peu de saumon ou de jeunes pommes de terre. L’obione peut être préparée au four, en chips. Toutes ces plantes salées et iodées peuvent se faire sécher pour obtenir un mélange d’épices marines, en les réduisant en paillettes.

Conservation.
La criste-marine peut être conservée au vinaigre : moitié eau, moitié vinaigre (de cidre de préférence) porté à ébullition. On couvre ensuite le bocal rempli de cristes-marines justes cueillies et rincées, que l’on ferme avant de le retourner comme nos confitures maison. Vous pourrez apprécier votre récolte quelques semaines plus tard. Prenez toutefois la précaution de goûter vos herbes avant de les ajouter à une moutarde, à une sauce ou à une salade, le goût peut avoir pris de l’ampleur. On trouve souvent la salicorne conservée par la même technique, mais elle y perd saveur, croquant et arôme ! Quant à la congélation, elle n’est destinée qu’à la criste, à la bette, à l’aster et à l’obione.

Salade marine - POUR 4 PERSONNES

Ingrédients
• 100 g de feuilles de roquette sauvage
• 50 g de feuilles de bette maritime
• 50 g de jeunes pousses de salicorne
• 20 g de petites feuilles d’obione séchées au four
• Quelques brins de criste marine
• 50 g de carottes
• 50 g de choux rouge
• 30 g de céleri Pour la vinaigrette 10 cl d’huile de noix
• 5 cl de vinaigre de cidre
• sel
• poivre

Préparation
1. Râper les carottes, le chou rouge et le céleri.
2. Rincer puis ciseler les feuilles de roquette et de bette maritime.
3. Dans un saladier, verser les légumes râpés et les herbes ciselées.
4. Ajouter la salicorne et mélanger doucement.
5. Parsemer votre salade de criste coupée finement et de feuilles d’obione séchées.
6. Ajouter la vinaigrette au moment de servir.

Criste et salicorne, depuis l’Antiquité

On trouve l’usage de quelques plantes maritimes depuis l’Antiquité. « Crithme » provient d’ailleurs du mot grec krêthmon pour « lieu escarpé » endroit de prédilection de la criste. Quant au mot salicorne, il dériverait de l’arabe Al Kali pour désigner cette plante utilisée au XIXe siècle pour produire de la soude, substance nécessaire à la fabrication du verre. Pline utilisait très certainement le terme « halymus » pour désigner la salicorne dans son Histoire naturelle, mais il nomme aussi une « absinthe marine » (livre XXXII, 31, 5) qui « chasse les vers intestinaux ; on la prend en breuvage avec de l’huile et du sel, ou délayée dans un potage fait avec la farine de blé ». Parlait-il de la criste, qui en a la saveur ? Ses usages médicinaux se lisent déjà chez Hippocrate pour « atténuer les douleurs en utilisation avec des fruits et en infusion dans du vin », comme chez le médecin grec Dioscoride, pour qui elle « guérissait la jaunisse ». On la consommait conservée dans la saumure. Elle fut même offerte à Thésée dans un poème de Callimaque. Pour Galien, la criste était utilisée comme plante digestive. Elle fut inscrite au Codex medicamentarius de 1732 et apparait dans Le Dictionnaire universel de matière médicale et de thérapeutique générale comme favorisant la digestion. On lui reconnaîtra par la suite, en 1844, des propriétés vermifuges. À cette même époque, deux cents navires emportèrent 25 000 boîtes de salicornes conservées très certainement au vinaigre pour la santé des marins, qui « s’en trouvèrent bien » selon Auguste Chevalier dans sa Revue de botanique appliquée.

Bonnes pratiques de cueillette

Selon les régions et les départements du littoral français, la règlementation concernant les cueillettes de loisir des plantes du littoral peuvent varier.
• Certaines plantes sont strictement protégées, interdites à la récolte – comme l’Immortelle des dunes (Helichrysum stoechas) dans le Finistère –, d’autres sont strictement règlementées (comme la criste-marine et la salicorne dans la Manche). Pensez à vous renseigner sur les sites dédiés. Pour favoriser la préservation de la flore, afin de pérenniser le renouvellement des espèces, il est déconseillé (et parfois interdit) de cueillir les plantes dans leur période de floraison. La salicorne, par exemple, doit être récoltée du 1er juin au 31 août. • Une variété d’obione, Halimione pedunculata (L.) Aellen, dite « obione à fruit pédonculé », est inscrite sur la liste des espèces végétales protégées sur l’ensemble du territoire. Sont donc interdits en tout temps et sur tout le territoire métropolitain : la coupe, l’arrachage, la cueillette ou l’enlèvement, le colportage, l’utilisation, la mise en vente, la vente ou l’achat de tout ou partie des spécimens sauvages. On s’équipe de ciseaux afin de couper proprement la plante : on prélève les parties aériennes de préférence en laissant une hauteur de 6 cm au moins en place. On grappille de manière à laisser quelques bouquets aux endroits récoltés (20 % environ). Bien entendu, la récolte doit être « familiale » : en règle générale on considère que « la quantité de plants ou fleurs autorisée par jour ne doit pas excéder ce que peut tenir la main d’une personne adulte ». Comme pour de nombreuses plantes, on évite les récoltes avant et après le coucher du soleil.

À savoir

Le chlorure de magnésium contenu dans l’eau de mer possède une forte teneur en magnésium élémentaire. Doué d’une très bonne solubilité, il est particulièrement bien assimilé par le corps humain. On le connaît sous sa forme en paillettes sous le nom de Nigari. Le magnésium marin présente l’avantage d’être en harmonie avec notre organisme, comme l’a démontré René Quinton. Il est donc plus efficace.

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