D'Osbeck à l'osbeckia... La belle histoire du nom des plantes
Le nom des osbeckias honore la mémoire du botaniste et voyageur suédois Pehr Osbeck, l'un des « apôtres de Linné » partis explorer la flore et la faune des contrées lointaines sous la férule de leur maître. Osbeck rapportera de ses voyages un matériau botanique d'exception.
Les osbeckias sont d'élégantes plantes herbacées ou arbustives originaires d'Asie et d'Océanie dont les jolies fleurs, souvent de couleur pourpre, sont parfois cultivées pour leur valeur ornementale. Parmi elles, plusieurs sont également dotées de vertus médicinales, comme l'Osbeckia octandra, endémique du Sri Lanka où elle est employée sous le nom de heen bovitiya dans la médecine traditionnelle ayurvédique. Celle-ci fait l'objet d'études pharmacologiques, en particulier pour son rôle possible dans le traitement de certains diabètes et maladies hépatiques.
Derrière une telle dénomination, on n'a pas de mal à deviner que se cache un nom de famille nordique : de fait, il s'agit de celui du naturaliste suédois Pehr Osbeck (1723-1805). C'est son compatriote, le célèbre Carl von Linné, l'un des fondateurs de la classification botanique moderne, qui forgea le nom de genre Osbeckia dans son ouvrage de 1753, le Species plantarum, expliquant à ce propos que c'était « en l'honneur de Pehr Osbeck, Suédois qui, en 1751...
, lors d'un périlleux voyage, est allé voir les plantes de Chine et de Java et les a collectées, examinées, décrites et partagées ». Linné aurait pu préciser qu'il n'était lui-même pas étranger à cette « périlleuse » expédition, dans laquelle Osbeck s'était lancé sur sa recommandation.
Issu d'une famille de petits propriétaires terriens du sud-ouest de la Suède, le jeune homme avait entrepris, au milieu des années 1740, des études de théologie à l'université d'Uppsala, où les cours de Linné, déjà très célèbre, lui donnèrent la passion de l'histoire naturelle. Or, à cette époque, Linné engageait justement certains de ses étudiants, qu'il jugeait les plus prometteurs, à entreprendre des voyages d'exploration dans des pays lointains, afin de lui envoyer ou de lui rapporter des spécimens d'animaux et de plantes exotiques. On surnomma par la suite ce groupe de voyageurs naturalistes les « apôtres » de Linné. Certains se rendirent en Amérique, d'autres au Proche-Orient, d'autres encore en Afrique, et un certain nombre d'entre eux ne revinrent pas : sept au moins moururent de maladie…
Osbeck, lui, eut de la chance. Parti de Suède fin 1750 en tant que chapelain sur un navire de la Compagnie suédoise des Indes orientales, il se rendit d'abord à Java, puis en Chine, à Canton, où il put étudier la faune et la flore pendant plusieurs mois. Ensuite, après une halte sur l'île de l'Ascension, il rentra au pays sain et sauf en 1752, offrant un matériau botanique et zoologique considérable à Linné. Ce n'était donc que justice que ce dernier, en retour, l'immortalise en donnant son nom à un genre de plantes venues d'Orient, qui cependant étaient déjà connues des naturalistes européens depuis plusieurs décennies.
De son côté, Osbeck publia la relation de son voyage et reprit une carrière de chapelain et de précepteur, puis de pasteur, continuant toutefois à s'intéresser à la botanique, ce qui lui valut d'être élu à l'Académie royale des sciences de Suède en 1758.