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L'hygiène au temps du savon noir

savon noir

Dans les hammams et sur le sol de la maison, on utilise un savon mou et noir toujours fabriqué avec de la potasse et un corps gras, traditionnellement avec des cendres noires et de l'huile d'olive. À l'heure d'une crise sanitaire mondiale, j'ai appris à le redécouvrir et à bien le choisir…

Quand il s’agit d’hygiène, nous espérons le meilleur pour notre corps, notre maison, mais aussi pour notre ­planète. Les gels hydroalcooliques étant très vite en rupture de stock au début du confinement, et mes mains commençant à gercer du fait des lavages quotidiens, j’ai testé le savonnage avec ma pâte de savon noir pour le corps. Après tout, pourquoi ses propriétés émollientes, régénératrices et hydratantes ne fonctionneraient-elles pas sur mes mains ? Je savais que mon amie Marie-Laure, incroyable bricoleuse, s’en servait pour se nettoyer les mains et le sol, après ses menus travaux : « C’est avec les plus vieux produits qu’on fait bien souvent des miracles et des économies ! », m’a-t-elle souvent témoigné. Les multiples légendes sur le savon noir nous ramènent toutes à l’histoire du savon. Inspiré sans doute d’un procédé égyptien, consistant à se laver le corps avec une pâte formée par la réaction de graisses animales et de bicarbonate de soude, le premier savon solide a été inventé à Alep, en Syrie, il y a 3000 ans. Mais, contrairement à ce procédé de saponification, le savon noir inventé au Maghreb est fabriqué avec de la potasse.

Riche en vitamines E

C’est à Essaouira, au Maroc, que l’on revendique alors cette invention du savon noir. Il se compose de pulpe d’olive saponifiée avec de la potasse, qui, à la différence de la soude, empêche la solidification du savon. Le savon noir se présente en effet sous la forme d’une pâte sombre et compacte qui devient onctueuse et blanche au contact de l’eau. Bien que n’ayant pas l’aspect conventionnel d’un savon, c’est un très bon nettoyant ; végétal et biodégradable, sans colorant ni conservateur, il a des propriétés purifiantes, relipidantes (car riche en vitamines E) et hypoallergéniques, dont on ne fait pas encore grand commerce.

Aujourd’hui, il n’y a pas que dans les pays du Maghreb que le beldi – appellation arabe du savon noir cosmétique s’inscrivant dans le rituel du ­hamman – est fabriqué traditionnellement. « Ce n’est pas parce qu’il y a peu de produits dans sa composition qu’il est facile à fabriquer. Je n’ai trouvé qu’un seul savonnier français capable de le ­réaliser avec une qualité qui répond à mon cahier des charges, et au label biologique », nous révèle Didier Phalip, fondateur et gérant du laboratoire français ­Naturado.

Aujourd’hui, le...

savon noir cosmétique, autrement appelé « savon noir hammam », est également vendu sous forme liquide, une alternative « plus pratique, mais pas seulement », selon Audrey Sconza, chef de projet chez Provendi Laboratoire, premier fabricant français de savons liquides : « Le savon noir liquide a cette particularité d’être plus stable, c’est-à-dire moins sensible aux variations de chaleur que la version pâte traditionnelle. Cependant, en cosmétique, nous veillons à n’utiliser que de l’huile d’olive de qualité supérieure et des adjuvants naturels afin d’obtenir un produit proche de la pâte et spécialement adapté à la peau. »

Un antibactérien qui adoucit les mains

Dans l’univers ménager, le savon noir est également largement vendu sous forme liquide. Quand il n’est pas complété par des adjuvants chimiques, sa composition compte de la potasse et un corps gras qui peut être moins onéreux que l’huile d’olive : l’huile de lin, de noix ou de tournesol. Julie Bousquet-Fabre, arrière-petite-fille du maître savonnier français Marius Fabre, revendique pourtant les qualités de l’huile de grignons d’olive qui fait la renommée de sa recette brevetée du savon noir multi-usage : « L’huile d’olive de deuxième pression est très concentrée et riche en acides oléiques ; elle garantit un savon noir quasiment identique pour la maison et pour le corps. » Elle précise néanmoins que c’est le pH basique du savon noir (autour de 10) qui en fait un puissant antibactérien, et la transformation des huiles en savon sous l’action de la potasse, qui lui donne un pouvoir lavant (détergent). « C’est pourquoi, je le recommande dans ce contexte de crise sanitaire, où nous cherchons à tout désinfecter, fréquemment, sans faire d’énormes dépenses et sans nous abîmer les mains », conclut la cogérante de la marque.

Cependant, se laver les mains avec de la pâte de savon noir n’est ni commode ni attractif. Mes enfants ont donc continué à les frictionner avec un pousse mousse classique et au bout de quelques jours, nous avons pu constater la différence entre la douceur recouvrée de mes mains grâce au savon noir, et la rugosité des leurs.

De Marseille ou d’Alep, quelles différences ?

Le savon d’Alep traditionnel est un pavé de 6 à 7 cm de ­couleur brun clair à l’extérieur et vert olive à l’intérieur. Séché au soleil pendant neuf mois, son aspect contraste avec sa définition de savon surgras qui a cette particularité de flotter sur l’eau. C’est un savon végétal constitué seulement d’eau, de soude, d’huile d’olive et d’huile de baies de laurier (teneur moyenne à 20 %). Il est idéal pour les peaux les plus fragiles, le rasage, mais aussi pour les cheveux et la lessive.

Le savon de Marseille de couleur plus claire, voire blanche, selon l’huile végétale, est souvent carré et pèse 600 grammes. Sa recette n’étant pas protégée, il faut ­observer certains critères pour identifier le vrai : il doit se composer à 72 % d’huiles et porter le sceau de son fabricant. Aujourd’hui, on le trouve aussi associé à des huiles essentielles (les parfums de synthèse sont à proscrire), mais, pour nettoyer les plaies, il vaut mieux le choisir le plus neutre possible, à l’huile d’olive.

Les formules à tout faire de Marie-Laure

Le pschitt pour la maison et le jardin

Porter un demi-litre d’eau à ébullition, puis le transférer dans un grand saladier. Y ajouter 60 grammes de pâte de savon noir ménager (ou cosmétique, mais c’est moins économique) et les mélanger jusqu’à dissolution. Induire dans le saladier 45 grammes de cristaux de soude, tourner, puis attendre le refroidissement en remuant de temps en temps. Compléter avec quelques gouttes d’huile essentielle de tea tree, de citron, de ­lavandin, ou de thym, selon la fragrance que vous préférez. Verser la préparation dans un flacon spray et conserver le reste dans une bouteille en verre fermée. Toujours secouer avant utilisation.

Utilisation

  • Pour nettoyer : émail, inox, plastique, verre, céramique, faïence, peinture, plaques de cuisson, four, tapis et moquette. Pour éviter l’invasion des araignées dans la ­maison, pulvériser sur la zone sale, puis frotter avec une éponge. Rincer à l’eau chaude selon le résultat voulu.
  • Sur un balcon ou dans un ­jardin, ­pulvériser ce mélange à 20 cm des feuilles de vos plantes pour en éloigner les pucerons. Aux pieds de vos plantations, cela vous permettra également de prévenir l’invasion des escargots et des limaces.

Astuce : Ajouter une cuillerée à café d’huile de table pour éviter que le mélange ne mousse trop et brûle les feuilles fragiles.

Variante : Pour le nettoyage du sol ­ (carrelage, lino) : utiliser l’excédant du mélange et diluer un demi-verre dans trois litres d’eau chaude. Rincer à l’eau chaude après le passage de la serpillière.

À la rescousse des animaux domestiques et des travaux !

  • Chiens : Brosser et peigner l’animal avant de lui mouiller les poils. Le frictionner ensuite avec quelques noisettes de savon noir (liquide ou en pâte) si possible à l’huile d’olive. Le laisser agir cinq minutes, puis le rincer abondamment.
  • Bricolage : Il est possible d’utiliser la pâte de savon noir pour graisser une porte qui grince ou décoincer un tiroir, laver et protéger du cuir, ou bien pour badigeonner le fond des casseroles afin d’éviter qu’elles accrochent (parole de scout).

Précautions : Tenir le savon noir hors de la portée des tout-petits. Veillez à le conserver à l’abri de la lumière.

À lire

Le savon noir, par Isabelle Louet, éd. Massin, collection 1 000 idées.

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