Et si vous aviez un foie gras ?
Les petits plats et les excès des fêtes peuvent-ils être néfastes pour notre foie ? Pas vraiment s'il s'agit de festins ponctuels. Mais, si une alimentation anarchique entraîne une accumulation de lipides dans nos cellules hépatiques, votre foie sera alors débordé. Et vous pourrez développer la maladie du foie gras. Heureusement, vous pouvez modifier ces facteurs de risque.
Près de 20 % de Français, soit 8 millions de personnes, seraient concernés par la maladie du foie gras, annonce l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Or le foie est un organe multifonctions : il participe à la digestion, au métabolisme des nutriments, à la synthèse des facteurs de coagulation, du cholestérol et de nombreuses protéines aux rôles multiples. Il sert de filtre pour de nombreuses substances toxiques. C'est aussi un lieu de stockage : glycogène, vitamine A, vitamine E, vitamine B12, fer. Mais les cellules du foie, les hépatocytes, ont besoin d'être en forme pour fonctionner. Or, leurs activités sont de plus en plus entravées par la maladie du foie gras. En termes de médecine, on parle de stéatose hépatique, c'est-à-dire d'une accumulation isolée de lipides dans le foie. Celle-ci peut évoluer vers une stéatohépatite non alcoolique (qui se fait connaître sous l'acronyme NASH pour non-alcoholic steatohepatitis). Bien que grave, cette atteinte demeure le plus souvent réversible si elle est diagnostiquée à temps. C'est d'autant plus important qu'à terme, elle expose le malade au risque de cirrhose, puis de cancer. Par le passé, l'alcool était le grand pourvoyeur de la stéatose hépatique. Mais aujourd'hui, les sodas sont de plus en plus souvent mis sur le banc des accusés. À la suite de plusieurs études, on l'a d'ailleurs baptisée la maladie du soda. Et à raison ! Dans l'organisme, un excès de boissons sucrées au sirop de fructose (généralement issu du maïs) peut être immédiatement converti en lipides qui vont alors s'accumuler dans le foie. Et si vous pensiez opter pour les sodas dits « sans sucres », passez votre chemin : ils contiennent des édulcorants comme l'aspartame et un additif, le colorant caramel (E150). Or, ces éléments sont des sources de produits de glycation avancée qui jouent un rôle dans l'inflammation et la résistance à l'insuline, deux éléments au cœur de la maladie du foie gras.
Du thé vert en prévention
Souvent cité pour ses qualités amincissantes, le thé vert renferme des éléments qui pourraient aussi avoir un intérêt dans la prévention de la stéatose. C'est le cas de l'épigallocatéchine-3-gallate, un composé phénolique antioxydant de la famille des catéchines, qui améliore en plus la sensibilité à l'insuline. Ces catéchines donnent sa saveur...
amère au thé vert. On y retrouve aussi la caféine qui optimise la lipolyse, c'est-à-dire la destruction des cellules graisseuses ainsi que l'acide caféique. Ce composé organique présent dans certaines plantes, permet aussi la réduction de l'accumulation des graisses dans les cellules hépatiques. La menthe douce et poivrée, la cannelle et l'airelle rouge en renferment une belle quantité mais pas le café !
Éviter les plats préparés
Mais les sodas ne sont pas les seuls responsables. Pistez bien les étiquettes car on retrouve aussi le fructose dans tout un tas d'aliments préparés. Inutile toutefois de vous restreindre sur les fruits frais dont la teneur en fructose est faible à modérée : moins de 10 g pour 100 g de pomme ou de raisin, moins de 5 g pour 100 g d'orange ou de pamplemousse. La consommation de fruits apporte aussi de bons nutriments comme les fibres alimentaires et les antioxydants, des facteurs protecteurs.
Comment limiter alors ce phénomène inflammatoire ? Une alimentation riche en vitamines C (fruits et légumes) et E (noix et amandes) pourrait avoir un effet protecteur tout comme la consommation régulière d'aliments bien dotés en zinc et sélénium (céréales, champignons), deux autres puissants antioxydants. A contrario, c'est bien la consommation d'aliments à index glycémique (IG) élevé (riz blanc, pain blanc, gâteaux, biscuits industriels, dattes, carottes cuites, pommes de terre en purée) qui est corrélée à la survenue de la stéatose. Il faut y ajouter les galettes de riz soufflé souvent présentées comme une collation santé alors que leur IG est très élevé (85). Quant aux fruits secs, soyez vigilants : leur IG est en général haut perché et seuls les abricots secs se démarquent avec un IG bas.
Enfin, il faut aussi veiller au choix des lipides : limitez votre consommation d'acides gras saturés (lait, fromage, beurre) à 10 % maximum des apports caloriques journaliers. Surveillez votre apport en d'acides gras polyinsaturés de la famille des oméga-6 (huile de tournesol, pépins de raisins, pignons, cacahuètes, graines de sésame). A contrario, les acides gras oméga-3 ont un effet protecteur avéré (graines de lin, de chia, pourpier, huile de colza, de chanvre, de perilla). En effet, plusieurs études ont démontré qu'en cas de NASH, la teneur en oméga-3 dans le foie est diminuée. Une diminution qui participe aussi probablement à la stéatose, à l'inflammation et à la fibrose.
Protéger son foie pendant les fêtes
Les fêtes de fin d'année sont une période à risque pour le foie, d'autant plus si celui-ci est déjà fragilisé. Très toxique pour le foie, l'alcool doit être consommé avec grande modération en privilégiant les boissons avec un faible degré alcoolique : un verre de vin plutôt qu'un whisky par exemple. On trouve d'ailleurs aujourd'hui des vins allégés en alcool (9 ou 10°). Si au moment des fêtes vous avez l'impression d'avoir fait des excès, finissez la soirée en buvant une tisane de fumeterre avec une cuillère de miel de romarin. Le lendemain, prenez un petit déjeuner léger à base de tisane de romarin assorti d'un pamplemousse. La naringénine qu'il contient est un flavonoïde antioxydant qui protège le foie. Elle pourrait également améliorer la sensibilité à l'insuline et prévenir l'accumulation des graisses dans le foie.
Privilégiez les aliments à faible densité énergétique
Pour accompagner ces mesures préventives, mangez régulièrement du soja (tofu, tempeh, lait et yaourts de soja). Plusieurs études ont démontré un effet potentiel préventif dans la survenue de ces maladies. Fait intéressant, cet effet serait en lien avec les protéines du soja qui moduleraient directement l'expression de certains gènes. Si vous préférez en limiter la consommation à cause de la présence des phytoestrogènes, tournez-vous alors vers les préparations de soja fermentées comme le tamari, le miso ou le tempeh qui en contiennent une moindre quantité.
Ces mesures préventives sont essentielles si vous êtes exposés à des médicaments qui favorisent la survenue d'une NASH comme les corticoïdes, mais aussi les pilules contraceptives ou les médicaments hormonaux de la ménopause. Enfin, une étude a démontré l'importance de l'amaigrissement dans la correction de la NASH : une perte de poids de 10 % a permis une régression des signes de NASH sur le tissu hépatique dans 90 % des cas. Encourageant !Laure Martinat
L'huile d'olive, une alliée du foie
L'huile d'olive est riche en oleuropéine, une substance antioxydante caractéristique qui lui donne sa saveur amère. Plusieurs études ont mis en évidence son rôle protecteur hépatique en prévenant l'accumulation des lipides dans le foie et en limitant la survenue de la fibrose en cas de NASH. Choisissez une huile d'olive vierge extra : elle est obligatoirement obtenue par expression à froid ce qui garantit la teneur en oleuropéine. L'huile d'argan en renferme aussi une belle quantité. Sa saveur puissante rappelle la noisette. Attention, son mode de production, souvent présenté comme éthique, n'est pas toujours autant griffé « développement durable » qu'il le faudrait. Renseignez-vous bien avant de l'acheter !