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Petite Camargue alsacienne : La magie des marais

Petite Camargue alsacienne : La magie des marais

Frontalière de l'Allemagne et de la Suisse, la première réserve naturelle d'Alsace se situe dans la zone à tresses de l'ancien lit majeur du Rhin. Cette relique de la jungle rhénane, une forêt dans les méandres du fleuve, témoigne d'une richesse floristique et faunistique très originale. D'autant que s'y associent plusieurs milieux naturels remarquables.

La Petite Camargue alsacienne, qui s’étend à la sortie nord de la ville de Saint-Louis, a été classée réserve naturelle en 1982. Quelque 120 hectares englobant le Grand Marais, les bras morts du Kirchenerkopf et, en contrebas, la première terrasse rhénane d’où jaillissent les eaux souterraines de la nappe phréatique, ont ainsi été protégés, et constituent en quelque sorte le dernier vestige de la jungle rhénane, cette forêt alluviale qui s’étendait le long du Rhin, développant lianes, troncs, branchages au milieu des marais ou des bras morts du fleuve, et évoquant une véritable jungle. En 2006, la réserve a été étendue à 904 hectares avec la renaturation d’une parcelle située entre le canal d’Alsace et le Rhin.

Le fleuve vagabond, naguère torrent glaciaire, coulait dans la plaine d’Alsace où il se divisait en de multiples bras. Laissant le sol à sec ou y déposant des alluvions en période de crue, le Rhin modelait le paysage et relançait sans cesse la dynamique de la végétation. La construction du canal de Huningue vers 1830 ainsi que des travaux d’endiguement quelques années plus tard, ont coupé le fleuve de son lit majeur. Une zone humide, appelée Au, s’est cependant maintenue grâce à la nappe phréatique. Aujourd’hui, de par cette histoire tumultueuse, la réserve fait se côtoyer dépressions humides, roselières, prairies humides, pelouses sèches, sources phréatiques, prés de fauche, forêts alluviales, étangs et mares.

Une station d’épuration naturelle

En vous promenant dans la réserve, vous aurez l’occasion de voir un terrain surélevé recouvert de roseaux (Phragmites australis) : c’est la rhizosphère, qui permet de nettoyer les eaux usées provenant des bâtiments centraux. La partie souterraine est composée du réseau racinaire de ces mêmes roseaux et de lits de graviers, sables et paille métallique. De nombreux champignons et bactéries microscopiques y vivent en symbiose avec les racines et « digèrent » les matières organiques présentes dans l’eau qui circule, modifiant les propriétés physiques et chimiques du sol rhizosphérique. L’eau rejetée est à nouveau propre. La rhizosphère ne génère aucune odeur.

Entrelacs de lianes

La réserve se parcourt à travers des sentiers pour la plupart balisés et identifiés, offrant de multiples possibilités de balades. L’un des plus caractéristiques est le Chemin de la pisciculture. Dès les premiers pas, abrité par la forêt, on s’enfonce dans la jungle rhénane. Une clématite vigne-blanche géante, dont les graines sont recouvertes d’arêtes plumeuses en été, se laisse admirer depuis le sentier. Elle compte, avec le lierre grimpant, la vigne sauvage, le houblon et le tamier, parmi les cinq espèces de lianes recensées sur le site. Au printemps, l’ail des ours (dont la cueillette est interdite dans la réserve), qui tapisse de vert les bordures du sentier, dégage son odeur puissante. Un peu plus loin sur le parcours, une barrière d’observation donne sur des bras morts du Rhin. Recreusés il y a quelques années, ils sont peuplés de roseaux, de touradons de carex, qui ont repris possession des lieux.

Ce sentier historique se prolonge et mène jusqu’aux bâtiments centraux. Construits dans les années 1850, ils composaient alors la première installation de pisciculture industrielle. La grande proximité de la nappe phréatique et l’eau fraîche de bonne qualité favorisaient l’élevage des saumons. Aujourd’hui, ces poissons toujours présents sont élevés dans un but de réintroduction dans le Rhin.

Après avoir pris le temps, à la belle saison, de contempler les libellules – la réserve en répertorie 40 espèces – se poser sur les branches de roseaux, vous aurez peut-être la chance d’apercevoir l’emblématique martin-pêcheur aux vives couleurs dans la roselière attenante aux bâtiments. Ce biotope unique peut coloniser de vastes surfaces, de quelques mètres carrés à plusieurs dizaines d’hectares. Le roseau ou phragmite peut cohabiter avec d’autres plantes comme la massette, le jonc commun ou le saule. On distingue les roselières sèches, qui se développent sur les terres soumises à une humidité limitée, souvent saisonnière, des roselières aquatiques. La base des tiges est alors recouverte d’eau la majeure partie de l’année. Ce concentré de biodiversité sert d’abri à divers animaux : la petite rousserolle effarvatte tisse son nid autour des tiges des roseaux, pendant que le rat des moissons y construit son refuge en forme de boule. En bordure de cours d’eau, les roseaux participent au maintien des berges.

La callitriche des marais, Callitriche palustris

Cette plante aquatique, signe d’une très bonne qualité d’eau, se reconnaît à ses feuilles flottantes disposées en étoile et à ses fleurs semblables à de petites gouttes d’or. Elle pousse dans une eau transparente dont la température varie autour de dix degrés. Son feuillage étant persistant, elle s’observe quel que soit le moment de l’année, ici dans une source phréatique, résurgence de l’eau de la nappe, au tout début du Chemin de la pisciculture.

Une forêt immergée

La balade se poursuit par un sentier peuplé d’arbres morts les pieds dans l’eau. Cette forêt immergée colonisée par six espèces de pics, se traverse sur un platelage en bois à l’abri de l’eau. Suivez le sentier et à l’intersection, montez dans l’observatoire, repère des ornithologues. Une fois en haut, vous dominerez la Mittlere Au, une succession de prés secs, humides, roselières et étendues d’eau ouvertes frangées de buissons et de forêts. Au-delà de cette aire, se trouve la partie la moins humide du Grand Marais, une zone tourbeuse où pâturent des bovins Highland. C’est là que l’on trouve aujourd’hui des plantes exigeantes et spécialisées tels que le rare œillet superbe, la gentiane pneumonanthe, l’euphorbe des marais ou encore la linaigrette à feuilles engainantes. Une proche forêt de saules, d’aulnes glutineux et de bouleaux borde ce milieu vulnérable, dont les merveilles fragiles résistent du mieux qu’elles peuvent aux aléas climatiques et aux pressions anthropiques fortes de la région des trois frontières.

Infos pratiques

Comment y aller ?

  • En voiture, à partir de Mulhouse, prendre l’A35, sortie Bartenheim, direction Saint-Louis et se garer rue du Canal, sur le parking du stade de l’Au.
  • 3 h 15 depuis Paris Est. à la gare de Saint-Louis, prendre le Distribus n° 604 jusqu’à l’arrêt Petite Camargue alsacienne (15 minutes environ).

La visite : Le Chemin de la pisciculture (2 heures, 3 km) s’emprunte à partir du parking. Expos et animations à la Maison de la réserve. La visite guidée « Découverte Petite Camargue alsacienne » (2 h 30, sur réservation) offre un bel aperçu des points clés du site.

Renseignements et réservations : Tél. : 03 89 89 78 59 et Petitecamarguealsacienne.com

Où dormir ? Hôtel de l’Europe 2, rue de Huningue à Saint-Louis. 115 e la nuit. Tél. : 03 89 69 73 55. Hotel-deleurope.com

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Plantes & Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.
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