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Quel avenir pour la planète chocolat ?

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Quel avenir pour la production du chocolat ?

Tous les ans, Pâques met le chocolat à l’honneur, mais notre gourmandise a un prix, écologique et social. La culture du cacao pèse sur les écosystèmes, et la baisse des prix étrangle les cultivateurs. Certains acteurs de la filière réagissent en conjuguant développement durable et commerce équitable. Un changement de modèle qui ne se fera pas sans les consommateurs.

Nos savoureuses tablettes de chocolat risquent-elles de disparaître d’ici 2050 ? C’est en effet ce que prédit une étude de l’agence américaine National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA). En cause, le réchauffement climatique et l’augmentation du nombre et de la durée des périodes de sécheresse, notamment dans les deux plus gros pays producteurs de cacao : la Côte d’Ivoire et le Ghana. La culture du cacaoyer nécessite en effet un climat chaud et humide et une pluviométrie régulière. Mais les problématiques liées à la culture du cacao sur le plan environnemental vont plus loin : entre 2001 et 2014, 117 866 hectares de forêts protégées ont été défrichés illégalement pour la culture du cacao au Ghana et plus de 90 % du couvert forestier ivoirien a disparu. Ceci alors que le cacaoyer se plaît à l’ombre de hauts arbres qui le protègent.

Ces chiffres, révélés en septembre 2017 par l’ONG Mighty Earth ont de quoi donner un goût amer à nos desserts préférés, car ils font état de la triste réalité de la filière. En effet, une grande part du cacao utilisé par les leaders du marché du chocolat (Nestlé, Mars ou Ferrero) est issu de ces plantations illégales. Les conséquences de la déforestation sont multiples : sur les hommes d’abord, qui ont besoin de l’humidité des forêts pour l’agriculture, mais aussi sur la faune et la flore sauvages. Aujourd’hui, les chimpanzés n’occupent que quelques zones disséminées, tandis que les éléphants, repoussés vers de maigres couloirs de forêts, deviennent des cibles encore plus faciles pour les braconniers. Enfin, comme l’explique Christian Cilas, chercheur au CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) et responsable de la filière cacao, « la culture en plein soleil favorise l’invasion de petits insectes comme les mirides du cacao, qui aiment beaucoup l’ensoleillement… et la sève des cacaoyers ».
Est-on pour autant réellement menacé par une pénurie de chocolat ? La réponse de Christian Cilas est nuancée. « Certes, il faut prendre en compte les problématiques environnementales, mais le cacao n’est pas plus menacé que d’autres cultures comme le riz ou la banane, qui subissent aussi de plein fouet les conséquences du réchauffement climatique. »

Chute des prix

Lorsque l’on pose la question du risque de pénurie à Christophe Eberhart, co-fondateur de la Scop Ethiquable, son explication est tout aussi tempérée. « L’information selon laquelle nous manquerions de cacao dans les années à venir ne date pas d’hier », explique-t-il. « Ces dernières années, on a aussi beaucoup entendu dire que les pays émergents comme la Chine ou l’Inde, qui consommaient jusqu’à présent peu de chocolat, allaient accroître leur demande. Pour y répondre, les producteurs se sont mis à produire plus. » Or il n’en a rien été. Conséquence ? Depuis la fin de l’année 2016, suite à un excédent de production de plus de 250 000 tonnes, le prix du cacao est passé de 3 000 à 2 000 dollars la tonne.
« C’est la baisse la plus importante depuis la crise de 2008, remarque Christophe Eberhart. Je vous laisse imaginer les conséquences de cette chute des prix sur les millions de petits planteurs de cacao qui vivent déjà pour une grande partie d’entre eux avec moins d’un dollar par jour. »

Les enjeux financiers de cette filière tenue par de grands groupes industriels étant énormes, « cela encourage certains laboratoires à développer des OGM », affirme Christian Cilas. En effet, des chercheurs des universités de Berkeley et de San Francisco, réunis au sein de l’Innovative Genomics Institute, ont expliqué pouvoir utiliser des « ciseaux à découper l’ADN » pour altérer celui des cacaoyers et les rendre ainsi plus résistants aux maladies causées par les changements de températures… Une solution peu souhaitable. Le chercheur du CIRAD préfère toutefois se montrer rassurant : « Je ne crois pas à la disparition de la barre chocolatée. Au pire, elle contiendra, à terme, un moins grand pourcentage de cacao. »

Les grands groupes amorcent en effet un changement de politique. En novembre 2017, lors de la COP23, qui a eu lieu à Bonn, en Allemagne, les grandes entreprises du chocolat et les gouvernements ghanéens et ivoiriens réunis au sein de la World Cocoa Foundation, ont déclaré leurs intentions de produire du chocolat « durable ». Ils ont signé une « charte d’actions communes » dont les premiers engagements seront de développer l’agroforesterie, le renouvellement des plantations, l’amélioration de la formation des paysans et la lutte contre le travail des enfants. Ainsi, le géant Barry Callebaut, leader du secteur, s’est fixé jusqu’à 2025 pour fabriquer des barres chocolatées avec du cacao 100 % durable. « Mais le problème est que l’approche des grands de l’industrie agro alimentaire est centrée sur la production et sur l’idée qu’il faut trouver des moyens “verts” de produire plus sans toucher aux prix », relève Christophe Eberhart.

Durable ne veut pas dire équitable …

Il faut, en effet, faire la différence entre « développement durable » et « commerce équitable ». « Dans le développement durable, on reste dans des relations de dépendance entre les différents acteurs. Le commerce équitable, au contraire, vise à développer la formation et l’autonomie des producteurs de cacao, et c’est selon moi le point de départ indispensable si l’on veut changer les choses », explique le fondateur d’Ethiquable. « Actuellement, nous achetons le cacao à 4 000-4 500 dollars la tonne alors qu’il est à 2 000 dollars, soit le double du prix du marché, mais cela permet aux coopératives d’avoir un niveau de vie décent. » Bien sûr, cela a des répercussions sur le prix du chocolat en magasin. Mais les consommateurs aussi doivent être placés devant leurs responsabilités.

Bien choisir son chocolat

Pour bien choisir votre chocolat, assurez-vous donc que votre plaquette est certifiée bio et équitable. Pour cela, vous devez y trouver le logo AB, ou le logo européen, ainsi qu’un logo commerce équitable : « Fair trade Max Havelaar », « Équitable écocert » ou le label « Producteurs paysans ». « Vérifiez aussi le pourcentage de cacao », conseille Christophe Eberhart. L’idéal est de privilégier un chocolat avec au moins 80 % de cacao.

« Les consommateurs sont maintenant prêts à accepter qu’il y ait moins de sucre dans leur tablette. Trois quarts des tablettes vendues sous la marque Ethiquable sont du chocolat noir. » Enfin, faites attention aux origines. En effet, le cacao a un goût très différent selon son terroir. Par exemple, un cacao du Pérou a une saveur de noix et de fruits sec. « En plus, l’agroforesterie du cacao y fonctionne très bien. On y associe des légumineuses pour fertiliser les sols, on fabrique du compost avec de l’humus, pour fertiliser », ajoute Christophe Eberhart. Le cacao d’Haïti possède une saveur qui rappelle celle des fruits rouges. « Les grandes marques mélangent les origines, ce qui a fait perdre ses lettres de noblesse au chocolat », déplore Christophe Eberhart. Et si nous nous mettions à reconsidérer le chocolat comme un aliment précieux, au même titre que le vin ou le safran, de manière à l’acheter et à l’apprécier à sa juste valeur ?

Chocolat ou cacao cru ?

Theobroma, le nom botanique du cacao, signifie « nourriture des dieux ». Grâce à sa teneur en flavonoïdes, le cacao aurait une action sur les risques de maladie cardiovasculaire et le mauvais cholestérol. Il possède également des propriétés antioxydantes : il prévient le vieillissement cellulaire et contribue à lutter contre les inflammations. Tonique grâce à sa teneur en théobromine et en caféine, il est aussi bon pour le système nerveux grâce à sa richesse en magnésium. Enfin, on le dit aphrodisiaque car il contient de la phényléthylamine, qui déclenche la production d’endorphine et stimule la libido. Mais comment faut-il consommer le chocolat pour profiter de toutes ces propriétés ? De préférence cru ! En effet, comme pour les autres aliments, il est prouvé que la cuisson altère les qualités nutritives du cacao. Le test ORAC a ainsi mis en avant le fait que le cacao cru, dont les fèves n’ont pas été torréfiées, contient trois fois plus d’antioxydants que le chocolat noir en tablette. Plusieurs marques surtout artisanales s’en sont fait une spécialité.

Le cacao en chiffres*

4,55 millions de tonnes : production mondiale de cacao
258 872 tonnes, soit 6,6 kg par habitant : consommation de chocolat en France
15 000 tonnes : consommation française à Pâques
60 % de la production de cacao provient d’Afrique de l’Ouest

* chiffres 2016 

La renaissance du cacao made in France

Après une longue éclipse, la culture du cacao a reconquis les terres martiniquaises depuis quelques années, notamment grâce à l’association Valcaco. Créée en 2015, celle-ci veut relancer la filière cacao française et valoriser le terroir. Elle regroupe une trentaine de producteurs et transformateurs de cacao du département. « La particularité du cacao martiniquais ? Il a une signature génétique propre au territoire », raconte Kora Bernabé, la présidente de Valcaco. Il faut dire que les cacaoyers les plus cultivés sont des espèces d’excellence : l’amelonado, à la saveur douce et délicate, et le trinitario, qui donne de grands chocolats noirs. Lors du Salon du chocolat de novembre 2017, l’association a été récompensée pour la qualité et la spécificité du cacao martiniquais, sélectionné parmi quarante pays en compétition. En 2017, les Frères Lauzéa ont créé la première tablette de chocolat « pays », c’est-à dire 100 % martiniquaise. Bien que la production soit encore balbutiante (6 tonnes en 2016, contre près de 100 tonnes dans les années 1970), « c’est bon signe, explique le chercheur Christian Cilas. La segmentation du marché, grâce au développement de petites productions, est le signal d’un retour à la qualité ». 

Quelles alternatives au chocolat ?

La pénurie de chocolat n’est certes pas encore pour demain, mais, pourquoi ne pas remplacer « l’or noir » dans nos pâtisseries ? D’autres plantes ont une saveur de chocolat évocatrice.

La caroube
La caroube est le fruit du caroubier. C’est une sorte de gousse contenant des graines brunes reconnaissables à leur goût farineux et sucré, qui ressemble à celui du cacao. La caroube est souvent utilisée dans l’industrie agroalimentaire en raison de sa saveur voisine de celle du chocolat, mais aussi parce qu’elle est dépourvue de composants stimulants et présente une teneur élevée en fibres. Bon marché, elle se trouve facilement en magasins bio sous forme de poudre à incorporer dans des préparations sucrées ou même en pâte à tartiner.

La sapote noire
La sapote noire est un étrange fruit issu d’Amérique latine, dont le goût et la couleur de la pulpe ressemblent étrangement à ceux du cacao. Fruit du sapotier, la sapote est beaucoup moins calorique que le cacao et très riche en vitamine C. Elle peut s’intégrer à des préparations de type pudding, se manger à la cuillère ou mélangée à du lait. Malheureusement, il est difficile de trouver ce fruit en France, à moins d’avoir la main verte ! Il existe en effet quelques sites Internet qui vendent des sapotiers, ou Diospyros digyna. 

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Plantes & Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.
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