Le baume de copahu : huile miracle d'Amazonie
Appelé huile de copaïba en Amazonie, le baume de copahu est une résine huileuse issue de différentes espèces de copahier, un arbre sud-américain. Anti-inflammatoire, ce cicatrisant puissant est issu de ramassage en forêt et d'exploitations raisonnées peu connues. Un nouvel essentiel que l'on présente trop souvent chez nous comme une huile essentielle…
La première fois que j’ai entendu parler du baume de copahu, c’était par une kinésithérapeute que j’allais consulter pour les pieds plats de bébé ; elle lui en appliquait sur la plante avant de lui poser des straps qu’il devait garder entre deux séances. Je n’ai aucun souvenir des raisons de cette application ; j’ai été bien plus marquée par le doux parfum boisé du baume, légèrement anisé, persistant pendant quelques semaines…
C’est une spécialiste, Rafaela Tillier, naturopathe d’origine brésilienne auteure de Secrets et rituels de la forêt amazonienne sorti ce mois-ci aux éditions Guy Trédaniel, qui m’éclaire sur cette expérience : « Au XVIe siècle, les colonisateurs ont rapporté dans leurs cahiers que les femmes indigènes mettaient cette résine sur le nombril des nouveau-nés pour les aider à cicatriser, et qu’elles s’en badigeonnaient le bas-ventre pour soulager leurs douleurs menstruelles. Donc ce baume convient aux tout-petits et devait servir à prolonger les effets du massage sur les pieds de votre bébé, peut-être comme antidouleur aussi… ».
En effet, le baume de copahu entre dans la pharmacopée en Europe dès le XVIIe siècle, comme anti-inflammatoire et cicatrisant, ainsi qu’en parfumerie (il est encore utilisé aujourd’hui comme fixateur aromatique). En 1627, dans son ouvrage L’Histoire du Brésil, Vicente Rodrigues Palha rapporte qu’il peut guérir n’importe quelle blessure, en particulier celles exposées au sang, de telle manière qu’il ne reste pas de cicatrice après la guérison. Aujourd’hui, les études ont identifié une molécule particulière, l’acide copalique et copaïbique, qui lui confère une action antibactérienne et stimulante du système circulatoire. Comme cicatrisant, il s’emploie traditionnellement pour soigner les plaies, les hématomes et les infections de l’épiderme comme les mycoses et la gale, et même les cors aux pieds. En outre, c’est sa haute teneur en sesquiterpènes (comme dans la myrrhe, l’opopanax ou l’élémi) qui en fait un puissant anti-inflammatoire agissant sur les douleurs musculaires et articulaires, contre les rhumatismes, l’arthrose, les entorses et tendinites, etc.
Dans la langue tupi-guarani...
des Tupis amérindiens, le terme copaï signifie « l’arbre et sa résine », d’où le nom de copaïer ou copahier pour désigner ce grand arbre de 20 à 40 mètres de hauteur dont les belles fleurs blanches s’épanouissent dans les forêts amazoniennes (également en Afrique occidentale) et dont la résine exsude naturellement (ou par forage). Elle est incolore à sa sortie, puis jaunit et s’épaissit au contact avec l’air. « Au Brésil, la résine est conditionnée en petits flacons (de 10 à 30 ml) que l’on peut trouver à bas prix sur les marchés de Belém do Pará par exemple, dans la région amazonienne du Brésil, vendus par les erveiras, les détentrices des propriétés médicinales des plantes de la forêt. En Europe, vous l’appelez baume de copahu, mais nous l’appelons huile de copaïba car sa texture est très huileuse ».
Une oléorésine pure
Rafaela me tend son petit flacon d’huile de copaïba rapportée du Brésil. Son parfum boisé et sa couleur jaune orangé, limpide, me rappellent le produit de la kinésithérapeute. Sa texture épaisse, voire visqueuse, le rend difficile à faire sortir du compte-goutte. Elle m’explique que c’est ainsi qu’on peut le différencier de l’huile essentielle de baume de copahu qui, elle, est plus liquide et possède une odeur plus subtile, pour un nez averti. Mais la confusion entre les deux produits est fréquente, y compris sur les étiquettes. Comme le baume de copahu contient naturellement un complexe d’huiles essentielles naturelles et d’acides gras linoléique et oléique, il est vendu en Europe dans la catégorie des huiles essentielles alors qu’il n’en est pas une techniquement : en effet, il n’a subi aucune distillation. Pour obtenir 10 ml d’huile essentielle de baume de copahu, les fabricants distillent environ 400 g de résine. « Une meilleure connaissance des plantes amazoniennes permettrait une utilisation directe de ce baume qui, comme oléorésine, n’a besoin d’aucune transformation. Mais seules 10 % des plantes brésiliennes sont répertoriées dans la pharmacopée, regrette Rafaela. Restons néanmoins positifs : en baume ou en huile essentielle, l’utiliser c’est bénéficier des vertus de la plante. » Et préserver le travail des populations autochtones…
L’huile essentielle, un produit récent
Il ne faut pas confondre le baume de copahu avec l’huile essentielle de baume de copahu, obtenue par distillation à la vapeur d’eau. « Beaucoup plus concentrée en bêta-caryophyllène que le baume, elle a un pouvoir très anti-inflammatoire. Elle doit être associée avec une huile végétale », précise Vanessa Bozec, docteure en pharmacie spécialisée en aromathérapie. Elle propose de diluer l’HE de baume de copahu à 10 % dans un macérat d’arnica pour apaiser les douleurs musculaires, articulaires ou liées à l’endométriose, à masser 2 à 3 fois par jour pendant 10 jours sur les zones concernées.
Recette de mère Nature
Bien appliquer le baume de copahu
Par Rafaela Tillier
Au Brésil, on utilise le baume de copahu pur. Mais comme celui-ci est très dense, il est plus pratique de l’associer à quelques gouttes d’huile végétale pour en faciliter l’application. Ce baume est sans allergène connu, mais vous pouvez tester votre tolérance avant emploi, en étalant une goutte sur votre poignet.
Animaux Suivant l’exemple des animaux qui se frottent directement à la résine des arbres, il est possible de soulager les douleurs rhumatismales des animaux domestiques en appliquant quelques gouttes de baume de copahu sur leur colonne vertébrale.
Douleurs musculaires et articulaires Masser avant et après le sport sur les zones sensibles avec le baume de copahu, pur ou dilué dans une huile végétale d’arnica.
Entorses, tendinites Mélanger le baume de copahu avec un tout petit peu d’huile d’amande douce afin que le remède soit le plus concentré possible. Masser 3 fois par jour.
Cheveux et cuir chevelu secs Concocter un masque avec un mélange de baume (20 %) et d’huile végétale d’argan ou de ricin (80 %), à garder sur la tête pendant 1 heure avant le shampoing. Peut être réalisé jusqu’à 2 fois par semaine.
Fibromyalgie Dans le creux de la main, faire un mélange minute, moitié baume de copahu et moitié huile végétale d’abricot. Masser quotidiennement les zones douloureuses. Idem pour les crampes menstruelles.
Plaies Quelques gouttes de baume pur une fois par jour sur la plaie la nettoieront. Recouvrir celle-ci d’une nouvelle compresse chaque jour jusqu’à cicatrisation. Pour les hématomes, renouveler l’application 3 fois par jour.
Cors et durillons Appliquer 1 ou 2 gouttes de baume pur en dessinant des petits cercles jusqu’à pénétration. à faire le soir, pour que le pied soit au repos après le massage.
Fatigue Tester l’application vigoureuse de quelques gouttes de baume pur sur la colonne vertébrale, les poignets et les tempes, jusqu’à 3 fois par jour.
Contre-indications : Bien que l’usage interne ait été expérimenté par les populations indigènes, notamment contre les maux de gorge, cet usage n’est pas recommandé car pas encore étudié.