Apithérapie
Au bon air des ruches
Lutter contre l'asthme, certaines allergies… Utilisée depuis plusieurs décennies en Europe de l'Est, la thérapie employant l'air des ruches reste confidentielle en France. Deux pionniers nous expliquent en quoi consistent ces cures.
« Après dix séances, un patient quinquagénaire, asthmatique et stressé, m'a annoncé qu'il gardait désormais sa Ventoline à portée de main, simplement au cas où », raconte Jerémy Trigaux. Dans son « Centre respiratoire par l'air des ruches », établi depuis cinq ans près de Charleroi, il est le premier apiculteur à proposer des cures d'air des ruches en Belgique. Chaque année, il y accueille une cinquantaine de patients qui lui sont adressés par des médecins ou via le bouche-à-oreille.
« Je me souviens de cet homme de 70 ans, atteint de la maladie de Parkinson, qui respirait très mal suite à une pneumonie qui avait été traitée de façon classique. Lors de sa première séance, il a péniblement parcouru, avec sa canne, les vingt mètres qui séparaient la porte d'entrée de son véhicule. Après dix séances, il respirait à nouveau quasi normalement et ses tremblements liés à Parkinson ont beaucoup diminué », témoigne-t-il, enthousiaste.
Les phéromones des abeilles pour réduire l'inflammation
Passionné par l'aspect scientifique de l'apithérapie, Patrice Percie du Sert a lui-même participé à plusieurs études. Dans son ouvrage Apithérapie, quand les abeilles soignent l'asthme et les allergies (Guy Trédaniel), il explique comment le méthyl palmitate – une des phéromones qui incitent les ouvrières à sceller l'alvéole de la ruche afin que la larve se transforme en nymphe – s'est montré capable, lors d'études in vitro et sur les animaux, de réduire les phénomènes inflammatoires menant à l'asthme, parfois aussi efficacement que les traitements stéroïdes classiques. Le méthyl palmitate pourrait aussi, selon des études sur les animaux, agir sur l'expression de certains gènes liés aux phénomènes inflammatoires caractéristiques de maladies comme l'asthme.
Respirer des phéromones via un masque relié à quatre ruches
Le principe repose sur le fait de respirer l'air des ruches grâce à un masque médical filtrant. Des cures de 15 séances de 30 minutes à une heure sont recommandées. Elles sont à réaliser du 1er mai au 30 septembre, durant le temps du couvain, une période de grande activité de la ruche où les ouvrières s'occupent des larves à naître. Le masque est relié à quatre ruches – soit l'équivalent de 230 000 abeilles ! – : « Nous devons en utiliser quatre, car s'il n'y avait qu'une seule ruche, la cure pourrait la refroidir et perturber son fonctionnement en générant du stress. »
Asthme : un excellent complément à la kiné respiratoire
Cette apithérapie agit sur les symptômes des patients atteints de troubles respiratoires, d'allergies, de stress ou de troubles du sommeil grâce à des molécules volatiles aux pouvoirs anti-inflammatoires qui émanent des abeilles. Ces dernières utilisent lesdites molécules pour communiquer entre elles (lire l'encadré).
Respirer l'air des ruches, à l'odeur agréable de propolis et de miel, est particulièrement bénéfique aux enfants atteints d'asthme et de troubles respiratoires. Des allergologues et pneumologues envoient d'ailleurs dans le centre certains de leurs patients qui réagissent peu aux traitements classiques. « Un enfant de six mois souffrait de sifflements et d'une respiration compliquée suite à une bronchiolite. Les médecins ne parvenaient pas à diminuer ses symptômes, même en doublant la dose de ses médicaments. Dès trois séances, ses sifflements ont diminué et il dormait beaucoup mieux. » Au bout de dix séances, couplées à de la kiné respiratoire, l'enfant a récupéré une respiration totalement normale.
Comme le confirme Patrice Percie du Sert, ingénieur en agriculture, spécialiste en apithérapie et fondateur de la société Pollenergie : « L'air des ruches est utilisé avec succès depuis plusieurs décennies en Ukraine et dans d'autres pays d'Europe centrale par les asthmatiques, les insuffisants respiratoires et les migraineux afin d'améliorer leur état. » Parfois, une supplémentation en propolis accompagne ce type de cure, qui, on l'espère, va pouvoir se développer.
