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Le savon de Marseille, un monument moussant !

Le savon de Marseille

Le savon de Marseille ne bénéficie d'aucune appellation contrôlée. Sa composition varie en fonction du savonnier. Mais c'est bien dans la cité phocéenne que se perpétue la tradition de ce produit populaire, bon à tout faire…

Eh oui, un savon de Marseille peut venir de Malaisie, du moment qu'il est écrit « savon de Marseille » sur l'emballage ! Alors, pour démêler le vrai du faux, direction Marseille, chez les gardiens de la tradition. Dans les magasins touristiques, l'argumentaire est bien rodé : « Le savon de Marseille est composé au minimum de 72 % d'huile végétale, comme l'huile d'olive, saponifiée à la soude, à chaud ou à froid ». Me voilà bien avancée ! Pour en avoir le cœur net, je décide de visiter la plus ancienne institution marseillaise perpétuant la fabrication artisanale de savon depuis 1856 : la savonnerie Fer à cheval. Un monument aujourd'hui classé, où travailla jadis Fernandel avant d'embrasser la carrière de comédien. À l'intérieur de ces bâtisses sans prétention, sept chaudrons de 15 tonnes s'érigent en maîtres, sous une belle charpente de châtaigner. Certains crachent une vapeur dont l'odeur m'attrape le nez. « C'est la signature olfactive du savon de Marseille, me rassure Rafaël Seghin, président de la savonnerie. Ici, nous saponifions avec de la soude l'huile de grignons d'olives (résidus solides issus de la pression d'huile d'olive vierge et extra-vierge, ndlr) en provenance du bassin méditerranéen. La glycérine naturellement produite au moment de la saponification est extraite par adjonction d'eau salée. La pâte à savon est ensuite cuite à 100 °C puis lavée à l'eau claire pour en ôter les impuretés, d'où la mention “extra-pur” figurant sur le savon de Marseille. Le processus prend huit à dix jours. »

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Porteur d'histoire

Cette méthode, transmise de maître savonnier en maître savonnier, est reconnue par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ­(DGCCRF) depuis 2003. Mais dès le XVIIe siècle, un édit légiférait la fabrication du savon de Marseille pour empêcher les contrefaçons… qui perdurent, la DGCCRF ne s'attachant pas à contrôler le lieu de fabrication ni l'origine des matières premières…

Si le savon dur (issu d'un mélange de suif animal et de cendres) existait dès le IIe siècle chez les Gaulois, le savon de Marseille tient ses origines du savon d'Alep – saponifié à partir d'un mélange d'huile d'olive et de laurier – dont la recette fut rapportée en France au temps des croisades. Très vite, avec les importations des colonies, il intègre deux huiles qui saponifient très vite et permettent une augmentation de la production : celle de coco qui rend le savon plus moussant, et celle de palme, qui permet d'obtenir des savons plus durs et résistants aux...

frottements des lavandières pour détacher le linge.

L'ère industrielle et l'arrivée des machines à laver sonnent le déclin de la savonnerie traditionnelle. Aujourd'hui, l'urgence climatique ayant relancé le marché du naturel, le savon de Marseille a de nouveau le vent en poupe et de nombreuses savonneries surfent sur la vague. La question n'est plus tant de trouver un vrai savon de Marseille qu'un bon savon de Marseille…

L'étiquette et l'odeur

Pour dénicher un savon de Marseille de qualité, sachez en déchiffrer l'étiquette, où seuls quatre ingrédients doivent figurer : huile d'olive saponifiée, 72 % (sodium olivate), eau (aqua), sel (sodium chloride), soude (sodium hydroxyde). La recette traditionnelle admet néanmoins l'huile de coco saponifiée (sodium cocoate) et l'huile de palme saponifiée (sodium palmate) si leur origine est contrôlée. Quant aux savons des marchés provençaux, ils doivent porter le tampon « 72 % » correspondant au taux minimum d'huiles végétales, afficher une couleur vert olive ou blanche et sentir l'odeur caractéristique (parfums de synthèse et huiles essentielles sont proscrits). Le tout pour 3 à 4 euros (le cube de 300 g).

À savoir 

La mention « saponification à froid » figurant sur certains savons implique la présence de glycérine (on ne peut l'enlever avec ce processus de fabrication). On destinera donc ce type de savons, plus émollients, à des produits cosmétiques. Ainsi, Élisabeth Fally, de la marque Baume & Sens dans le Morvan, propose un « Savon de Marcelle », adaptation de la recette traditionnelle !

Un minimum de 72 % d'acides gras

Les puristes, comme Raphaël Seghin, sont formels : « Le savon de Marseille n'a besoin d'aucun ajout : il s'adapte à toutes les peaux. Hypoallergénique parce que sans additifs, il est une alternative saine et économique aux savons avec additifs et aux gels douche. Pour les non-initiés, la peau revient à son équilibre naturel après huit à dix jours d'utilisation ». Ses propriétés sont assurées par les acides gras de l'huile d'olive, qui compte 16 % de polyinsaturés et 55 % d'acide oléique (oméga‑9), complétés par 2 % d'antioxydants (phytostérols et vitamine E) et une petite quantité de squalène végétal, facteur naturel d'hydratation de la peau. Aussi, ce savon peut nettoyer des peaux eczémateuses, acnéiques ou encore des peaux de bébé. « On peut aussi se laver les dents avec ! », essaie-t-on de me convaincre en magasin… J'ai préféré apprécier son efficacité sur les boutons de moustiques, en frottement à sec sur la zone concernée, et, plus étonnant, en remède contre les crampes nocturnes, fréquentes dans mes jambes par temps chaud, en glissant un pain de savon de Marseille (chargé d'ions sodium et magnésium) sous mes draps. C'est fou le nombre de produits qu'il peut remplacer, « peuchère » !

Un savon à tout faire qui se reforme et se transforme…

Manipuler la soude est périlleux et le calcul de sa concentration s'avère complexe. C'est pourquoi nous vous déconseillons de fabriquer vos propres savons de Marseille. En revanche, vous pouvez utiliser vos restes de savon ou bien une forme en copeaux pour fabriquer des produits d'hygiène et d'entretien naturels, écologiques et économiques. Voici quelques idées que la savonnerie Fer à cheval propose également lors de ses ateliers.

Le savon de refonte

Ne jetez plus vos restes de savon de Marseille ! Voici deux astuces pour les utiliser jusqu'au bout.

  1. Couper les restes en tout petits morceaux et y ajouter le même volume d'eau de source ou d'infusion de plantes.
  2. Faire tiédir au bain-marie, mélanger doucement jusqu'à ce que la mousse disparaisse et que le résultat épaississe.
  3. Hors du feu, ajouter 2 c. à soupe d'huile d'olive pour plus d'hydratation, ou d'huile de coco pour l'odeur.
  4. Homogénéiser et verser dans des moules en silicone.
  5. Laisser sécher au frais pendant 2 à 6 semaines. Plus ils seront secs, plus ils seront concentrés en savon.
  6. Démouler et conserver dans du papier de soie, du papier kraft ou de la gaze.

Autre astuce : Placer les petits morceaux de savon dans un sac en crin que vous utiliserez comme un gant de gommage.

Gel douche

  1. Dans une casserole, faire chauffer 1 litre d'eau à feu doux et incorporer 20 g de copeaux de savon de Marseille.
  2. Mélanger jusqu'à dissolution. Éteindre le feu et continuer à mélanger pendant quelques minutes.
  3. Après refroidissement, ajouter 1 c. à soupe d'huile d'olive ou d'huile de coco, et 1 c. à soupe de miel liquide.
  4. Verser idéalement dans une bouteille en verre. Bien agiter avant utilisation.

Lessive liquide

  1. Dans un grand contenant, verser dans l'ordre 1 litre d'eau bouillante, 20 g de copeaux de savon de Marseille et le même poids de bicarbonate de soude.
  2. Bien mélanger jusqu'à homogénéisation. Secouer avant utilisation.
  3. Prélever 100 ml pour chaque lessive.

Liquide vaisselle

  1. Dissoudre 50 g de copeaux de savon de Marseille dans 1 litre d'eau bouillante.
  2. Ajouter 15 g de bicarbonate de soude (1 c. à s.) et 15 g de cristaux de soude (1 c. à s.).
  3. Bien mélanger et laisser reposer quelques heures. Si la texture est trop pâteuse, rajouter un peu d'eau et secouer.
  4. Verser dans une bouteille vide, fermer. Vous pouvez faire la vaisselle avec ou sans gants !
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