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L'ashitaba, une angélique à la mode orientale

L'ashitaba

Dans nos régions, on associe l'angélique officinale aux anges, voire aux archanges… Au Japon, ce genre cosmopolite, qui compte bien d'autres espèces, est valorisé aussi bien dans la gastronomie qu'en médecine. L'ashitaba en particulier contiendrait des antioxydants prometteurs.

En Asie orientale, plusieurs angéliques sont des plantes médicinales réputées depuis des temps immémoriaux. L'une d'elles, endémique du Japon – c'est-à-dire qu'elle ne pousse nulle part ailleurs dans le monde –, fait aujourd'hui parler d'elle après de récentes études validant sa teneur importante en molécules antioxydantes. Les Japonais la nomment ashitaba, car ils affirment que si l'on en coupe une feuille, elle aura repoussé le lendemain, tant est grande sa puissance de régénération : il est exact qu'un bourgeon apparaît rapidement et ne tarde pas à se développer. De là à en faire une panacée, il n'y avait qu'un pas, franchi depuis longtemps par les natifs de l'archipel.

L'utilisation thérapeutique d'Angelica keiskei – tel est son nom botanique – est très ancienne et la plante est cultivée dans les jardins médicinaux depuis l'époque où Nara était la capitale du Japon (710-784). Elle passait globalement pour prolonger la vie de ceux qui s'en servaient régulièrement. Plus spécifiquement, on considérait qu'elle favorisait la sécrétion des urines, stimulait la digestion, guérissait les blessures et prévenait les infections. Sa sève jaune caractéristique était employée pour traiter la variole au XIXe siècle. À l'époque d'Edo (1600-1868), Kaibara Ekken, auteur du traité Yamato honzō, décrivait la plante sous le nom ashitagusa, en la considérant comme un puissant tonique capable de restaurer rapidement la santé des organismes affaiblis. Les exilés politiques sur les îles au large de Tokyo, nombreux à cette période, y auraient puisé la force de résister au harassement du labeur sévère auquel ils étaient soumis.

Carte d'identité

L'ashitaba (Angelica keiskei) croît spontanément sur la côte pacifique de l'archipel nippon depuis Tokyo jusqu'à Nagoya et dans les îles proches. On la cultive largement en dehors de son habitat naturel. Elle n'est guère exigeante et se développe rapidement.

C'est une apiacée (ombellifère) vivace dont la taille varie d'une soixantaine de centimètres à plus d'un mètre vingt. Elle présente de larges feuilles formées de nombreuses folioles de grande taille et produit de vastes ombelles composées pourtant de petites fleurs blanches, et des fruits aplatis. Toute la plante, riche en essences aromatiques, dégage au froissement une puissante odeur aromatique. Elle se caractérise par un abondant suc jaune qui permet de la distinguer d'autres espèces. Elle est nommée en hommage à Keisuke Ito, médecin et biologiste japonais de Nagoya (1803-1901), qui mit au point un vaccin contre la variole

>– maladie que notre plante était censée combattre.

Autophagie cellulaire

Comme c'est souvent le cas en Asie, la limite entre plante médicinale et plante alimentaire n'est pas aussi nette que chez nous. Aussi est-il courant de consommer l'ashitaba quand on est à table au Japon. Les jeunes tiges, les feuilles avec leur pétiole ainsi que les racines entrent dans la composition de diverses spécialités régionales. On en fait avant tout de la tempura, les beignets japonais, mais elles servent aussi à la confection de nouilles de sarrasin, de thés, de crèmes glacées et autres desserts, voire d'alcool. On apprécie particulièrement une variété connue sous le nom de mikura-jima et réputée moins amère que les autres.

De récentes recherches ont mis en évidence dans l'ashitaba la présence d'un flavonoïde particulier répondant au joli nom de 4,4'-diméthoxychalcone (DMC). Globalement, les flavonoïdes possèdent des propriétés antioxydantes leur permettant de « piéger » les radicaux libres responsables, en partie, du vieillissement de l'organisme. L'étude en question précise que « l'administration externe de DMC augmente la durée de vie des levures, des vers et des mouches, décélère la sénescence des cultures de cellules humaines et protège les souris d'ischémie cardiaque [insuffisance d'irrigation d'un vaisseau du cœur] prolongée ». En outre, le DMC induit l'autophagie cellulaire qui permet à l'organisme de se débarrasser de ses cellules endommagées. L'étude affirme avoir identifié et caractérisé mécaniquement les vertus de l'ashitaba et la considère comme un « médicament naturel anti-âge », confirmant ainsi les effets favorables sur la santé et la longévité qui lui sont attribués dans les médecines asiatiques traditionnelles.

Les autres angéliques des médecines orientales

  • L'hama udo (Angelica japonica) est une espèce commune en bord de mer et beaucoup plus abondante que l'ashitaba. Elle se distingue de cette dernière par une taille souvent supérieure, des tiges et des pétioles nettement teintés de rouge (ceux de notre plante sont verts) et un suc incolore. Elle fleurit de mai à octobre, alors que l'ashitaba n'est en fleurs que de mai à juillet. La saveur de l'angélique du Japon, peu consommée, est clairement plus marquée et amère.
  • Le tōki (Angelica acutiloba) est estimé pour ses vertus curatives. Native du nord de Honshu jusqu'à Hokkaido, elle est particulièrement cultivée dans la région de Nara, célèbre pour ses plantes médicinales. On l'apprécie également en Chine, en Corée, à Taïwan et en Indonésie. C'est un élément important du kampō, la médecine traditionnelle japonaise. Son utilisation concerne avant tout la sphère féminine, mais elle permet aussi de lutter contre le froid, la constipation et les douleurs. Elle se reconnaît à ses feuilles aux folioles bordées de dents très aiguës. La plante est également comestible.
  • Le dāngguī (Angelica sinensis) est une autre espèce asiatique dont les racines sont utilisées en médecine traditionnelle chinoise. Elle est notée Radix angelica sinensis dans les prépa­rations exportées en Occident.

Propulsée au rang de superfood

De ce fait, la plante est depuis quelques années devenue une superfood aux États-Unis, mise en avant dans de nombreux compléments alimentaires, et les fabricants de cosmétiques s'y intéressent. Sans doute ne devrait-elle pas tarder à être portée aux nues en Europe. Mais cet intérêt devrait aussi nous inciter à regarder du côté de nos angéliques occidentales. Chez nous, l'angélique archangélique (Angelica archangelica), introduite au XIIe siècle des pays scandinaves et cultivées, fut longtemps tenue pour une véritable panacée. Elle servait en particulier à soigner les troubles nerveux : vertiges, migraines, céphalées, digestions difficiles, etc. L'angélique sylvestre (Angelica sylvestris), commune à l'état sauvage dans les lieux humides de toute l'Europe, possède sensiblement les mêmes indications. Et il y a fort à parier qu'à l'instar des plantes sauvages comestibles, elle renferme d'importantes quantités de divers antioxydants, dont les flavonoïdes tant vantés chez l'ashitaba… sans compter que plutôt que des gélules, elle nous donne la possibilité d'en manger les jeunes pousses

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