Dossier
Régime méditerranéen, l'alimentation protectrice pour tous (3/4)
Un régime miracle qui nous garde en bonne santé ? Non, il n'y a rien de miraculeux dans cette diète alimentaire plutôt végétale, très variée, savoureuse et conviviale. En revanche, travaux scientifiques à l'appui, elle fait aujourd'hui l'unanimité et nous promet une meilleure forme et une meilleure santé. À condition d'en comprendre les enjeux et les principes.
Éloigner les maladies cardiovasculaires
Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité des femmes (loin devant le cancer du sein), la deuxième chez les hommes. « Deux cents femmes meurent chaque jour de pathologies cardiovasculaires (l’AVC en tête), alors même qu’une majorité de ces décès seraient évitables », déplore le Dr Jean‑François Renucci. Si l’on met de côté le tabac, les facteurs de risque majeurs de maladies des artères (hommes et femmes confondus) peuvent être contrôlés par ce que nous mettons dans notre assiette. L’excès de viande rouge, de sel, de mauvais gras et de sucre sont en effet les principaux responsables d’hypertension, de cholestérol et de diabète de type 2, eux-mêmes généralement considérés comme des facteurs majeurs d’athérosclérose, qui fait le lit des pathologies vasculaires.
Or on sait aujourd’hui précisément, et avec certitude, quelle alimentation soutient la santé cardiaque : la diète méditerranéenne ! L’étude de référence, dite « étude des sept pays » (seven country study), réalisée à l’initiative du médecin américain Ancel Keys, a ainsi mis en évidence, dès le milieu du XXe siècle, un taux d’événements cardiovasculaires nettement moins élevé chez les habitants du pourtour méditerranéen, notamment en Grèce et en Italie.
En France, les travaux du Dr Michel de Lorgeril (Lyon diet heart study), pionnier en la matière, font encore aujourd’hui figure de référence. « Nous avons commencé à travailler sur les liens entre diète méditerranéenne et santé cardiovasculaire dans les années 1980, explique le Dr de Lorgeril, en proposant à nos patients coronariens avérés (ayant subi un épisode cardiaque, ndlr) une alimentation de type méditerranéen et nous avons obtenu des résultats tellement probants sur la santé cardiovasculaire qu’ils ont été repris par toute la communauté scientifique internationale. » D’ailleurs, adopter une alimentation méditerranéenne fait aujourd’hui partie des recommandations de base de la Société européenne de cardiologie. Plus près de nous, de nouvelles données observationnelles, parues dans la revue Heart en mars 2023, semblent indiquer un bénéfice accru chez les femmes, jusque-là peu représentées dans les cohortes : en s’inspirant d’une alimentation méditerranéenne, elles diminueraient le risque de développer une maladie cardiovasculaire de 24 % (maladie coronarienne notamment), et celui de décès de 23 %.
Quatre bonnes raisons de manger de l’ail
Incontournable dans la cuisine méditerranéenne, l’ail se distingue également par ses atouts santé.
Il est bon pour le cœur
- L’ail soutient notre santé...
- ; cardiovasculaire. Plusieurs études ont montré qu’il avait un impact positif sur le taux de triglycérides dans le sang, (associés à l’apparition de mauvais cholestérol sanguin) et la tension artérielle. Il est en outre un bon fluidifiant sanguin.
Il soutient l’immunité
- Il agit comme un immunostimulant. Particulièrement bien pourvu en vitamines, minéraux et antioxydants puissants (phénols et flavonoïdes), l’ail est indiqué pour booster les défenses immunitaires.
Il tue les microbes
- L’ail détruit les vers intestinaux. C’est un antiseptique puissant, traditionnellement utilisé par nos grands-mères comme vermifuge (on dit qu’il a des propriétés anthelminthiques).
Il diminue les risques de cancer
- Ses substances soufrées protègent contre la formation des nitrosamines (produites par nos bactéries intestinales à partir des nitrates et nitrites présents dans de nombreux aliments), qui sont puissamment cancérigènes.
Le café ne provoque pas de tachycardie !
Largement consommé dans les pays du pourtour méditerranéen, en expresso ou plus ou moins allongé, le café est souvent soupçonné de provoquer des troubles du rythme cardiaque — tachycardie, fibrillation auriculaire… Pourtant, plusieurs études vont à l’encontre de cette idée répandue. Une étude de 2021 a ainsi établi que la consommation modérée (1 à 7 tasses par semaine) de café semblait plutôt diminuer les risques d’arythmie cardiaque alors que des chercheurs espagnols ont de leur côté montré que le café réduisait le risque de fibrillation auriculaire.
De tels bénéfices s’expliquent assez simplement, d’après les experts que nous avons interrogés. Comme dit plus haut, la pyramide alimentaire typique d’un régime méditerranéen exclut ou réduit à peau de chagrin les nutriments ennemis de nos artères (graisses saturées par exemple), mais ce n’est pas tout ; elle offre aussi en quantité des nutriments amis de nos artères. Les antioxydants en particulier, qui améliorent la fonction endothéliale. Celle-ci joue un rôle dans la vasomotricité et son altération « est l’une des premières étapes conduisant à l’athérosclérose » d’après une équipe de médecins angevins. Les antioxydants luttent également contre les radicaux libres qui altèrent l’élasticité des cellules composant nos artères. Les polyphénols comme le resvératrol, présent en quantité dans certains fruits – le raisin notamment, et donc le vin –, mais aussi les dérivés de l’acide phénolique (acide caféique par exemple, présent dans le café) ou l’acide férulique dans les céréales, sont des antioxydants puissants qui réduisent l’inflammation à l’origine de troubles cardiovasculaires. Un consortium européen de chercheurs a par ailleurs confirmé dans une publication de 2019 que les vertus de ces polyphénols constatées in vitro se confirmaient chez l’humain, grâce à la mesure de la concentration de la protéine C-réactive, marqueur d’inflammation, beaucoup moins présente quand on adopte une alimentation riche en polyphénols comme la diète méditerranéenne.
Vin au repas : bonne ou mauvaise idée ?
Le vin à chaque repas fait partie intégrante de la diète méditerranéenne. Une bonne habitude, d’après le Dr Michel de Lorgeril qui explique que « l’alcool est un excellent vasodilatateur et antiplaquettaire, deux bons points pour le cœur, alors que le vin – rouge ou blanc – apporte en plus du resvératrol, un polyphénol à la puissante action antioxydante ». On ne se prive pas dans la mesure où l’on reste raisonnable (deux verres par jour), car l’excès d’alcool annule ces effets positifs. Et l’on préfère des vins de qualité, si possible bio ou « naturels », une enquête France Info ayant révélé en 2018 que l’on pouvait trouver jusqu’à 15 pesticides différents dans une bouteille de bordeaux, ainsi que des quantités de sulfites très variables (de 10 à 202 mg/litre) d’un cru à l’autre.
Les autres atouts du régime méditerranéen pour préserver le cœur ? Les graisses végétales, indiscutablement. En 2018, une ré‑analyse de l’étude Predimed (pour Prevención con dieta mediterránea), publiée en 2013, qui avait établi le rôle prépondérant de l’huile d’olive dans la bonne santé cardiovasculaire des habitants du pourtour méditerranéen, confirme ces données. Dans cette nouvelle étude, les chercheurs ont testé deux déclinaisons de ce régime sur des personnes présentant des risques cardiovasculaires : une alimentation méditerranéenne enrichie de 4 cuillerées à soupe d’huile d’olive pour un groupe et de 30 g de noix pour l’autre, tandis que le troisième groupe suivait un régime pauvre en graisses. Résultat : le risque d’accidents cardiovasculaires (infarctus, AVC) était réduit de 30 % environ dans les deux groupes consommant huile d’olive ou noix. « Il est aujourd’hui prouvé que la qualité des graisses qui composent l’alimentation méditerranéenne est en grande partie responsable de cet effet protecteur (sur le système cardiovasculaire, ndlr), en particulier l’acide oléique (huile d’olive) et les fameux oméga‑3 (présents dans les poissons mais aussi les oléagineux tels les noix ou les graines de colza) », précise le Dr Guy Avril dans Je mange méditerranéen au quotidien (éd. Thierry Souccar).
Le bon gras des oméga-9
L’huile d’olive est riche en acides gras mono-insaturés (oméga-9) qui « diminuent le mauvais cholestérol sanguin (LDL) et augmentent le bon cholestérol (HDL) », rappelle la Fédération française de cardiologie. Ses effets sont en outre décuplés quand elle prend place dans une diète méditerranéenne, car son action est alors dopée par la présence des autres nutriments dominants dans ce mode alimentaire (antioxydants, fibres…). De plus, il faut garder à l’esprit que si un tel régime favorise les bonnes graisses végétales, il limite en revanche les graisses animales, surtout celles qui sont saturées, délétères pour le cœur. L’idée n’est pas de consommer de l’huile d’olive en plus de la crème fraîche, mais à la place.