Débouchez votre nez sans médicaments
L'Agence nationale de sécurité du médicament l'affirme : les vasoconstricteurs utilisés pour venir à bout d'un rhume ne sont pas anodins. Alors prenons le problème par le bon bout sans chercher à employer les grands moyens. Dégager son nez avec des inhalations ou des massages, recommande la Dre Laure Martinat, c'est le bon moyen naturel, pour toute la famille et à tout âge !
Dès les premiers symptômes d’un rhume, certains d’entre nous avalent des médicaments sans ordonnance type Actifed, Humex ou Rhinadvil, qui soulagent le nez bouché. Or, depuis l’an dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) recommande d’éviter ces derniers en cas de rhume. Suite à la remontée de quelques cas d’effets indésirables graves, elle considère qu’ils font encourir des risques disproportionnés pour remédier à un simple nez bouché. Ces médicaments contiennent de la pseudoéphédrine, une molécule aux propriétés vasoconstrictrices qui soulage la congestion nasale « en resserrant les vaisseaux sanguins », explique la docteure Laure Martinat, experte en phytoaromathérapie. Le problème, précise-t-elle, c’est que cette molécule, très puissante, n’agit pas qu’au niveau local et « peut causer, dans certains cas rares, une vasoconstriction des vaisseaux du cerveau entraînant maux de tête, troubles de la vision, voire de la confusion. » Heureusement, l’aromathérapie nous offre de nombreuses solutions alternatives.
La vapeur, un vecteur pour les molécules aromatiques
Pour celle qui vient de publier Le Guide familial de la santé (éd. Mango), l’inhalation humide d’huiles essentielles (HE) est un excellent moyen de traiter le nez bouché : « La vapeur d’eau contribue à fluidifier les sécrétions et à lutter contre le dessèchement des muqueuses respiratoires » ; et elle est un vecteur pour les molécules aromatiques des huiles essentielles qui « arrivent directement au site d’intérêt : la sphère ORL ».
Durant un épisode de rhume, les écoulements sont d’abord plutôt liquides et limpides, accompagnés d’éternuements. Puis, au bout de quelques jours, ils deviennent plus épais, ce qui génère la sensation de nez bouché. En pareil cas, chez l’adulte et l’enfant de plus de 12 ans, Laure Martinat propose une formule d’inhalation à base d’huiles essentielles. Celle-ci stimule le système immunitaire grâce à l’HE d’arbre à thé, anti-inflammatoire et antivirale. Elle contient également du ravintsara, « une excellente antivirale particulièrement efficace sur les virus hivernaux responsables des affections ORL ». L’HE d’inule odorante, « injustement méconnue », favorise l’élimination des sécrétions et participe à éviter que le virus aille se fixer sur les bronches. Elle agit en synergie avec celle d’eucalyptus radié, eucalyptus « de référence » de la sphère ORL dont l’efficacité repose en partie sur sa teneur en 1,8-cinéole.
Formule Inhalation fluidifiante ou décongestionnante
Par la Dre Laure Martinat, experte en aromathérapie
Propriétés : Fluidifie les sécrétions pour faciliter leur élimination. Le cas échéant, décongestionne l’œdème de la muqueuse nasale, à l’origine de la sensation de nez bouché.
Indications : En cas de rhinopharyngite, éventuellement avec une sensation de nez bouché liée à des sécrétions importantes, ou avec une sensation de nez bouché mais peu de sécrétions lors du mouchage.
Inhalation
- HE d’arbre à thé Melaleuca alternifolia 25 gouttes
- HE de ravintsara Cinnamomum camphora 25 gouttes
- HE d’inule odorante Inula graveolens 15 gouttes
+ en cas de nez bouché avec écoulement
- HE d’eucalyptus radié Eucalyptus radiata 15 gouttes
+ en cas de nez bouché sans écoulement
- HE de menthe des champs Mentha arvensis 10 gouttes
Procédé de fabrication : Verser les huiles essentielles (HE) concernées dans un flacon en verre teinté. Mélanger après avoir fermé le flacon.
Posologie et utilisation : Verser 3 gouttes du mélange dans une tasse d’eau chaude ou un inhalateur. Réaliser une inhalation pendant une dizaine de minutes, yeux fermés, un linge de coton sur la tête. À faire 3 fois par jour pendant 3 à 5 jours.
Précautions d’emploi : Réserver à l’adulte et à l’enfant à partir de 12 ans en l’absence d’allergie connue, asthme ou épilepsie.
En cas de nez bouché mais avec peu de sécrétions, il faut chercher à...
; décongestionner le nez, explique Laure Martinat, car « c’est l’œdème de la muqueuse qui est principalement responsable de cette sensation ». Vous pouvez alors réaliser une variante de cette inhalation en remplaçant l’huile essentielle d’eucalyptus radié par celle de menthe des champs. « Anti-inflammatoire mais surtout excellente décongestionnante », elle a des propriétés vasoconstrictrices grâce à sa forte teneur en menthol. Quoi qu’il en soit, veillez à ce que la température de l’eau ne soit pas trop élevée, pour ne pas brûler votre visage ou vos muqueuses respiratoires.
Deuxième réflexe en cas de nez bouché : les lavages de nez, qui aident réellement à réduire l’intensité du rhume. Ils sont à réaliser plusieurs fois par jour, afin d’humidifier l’intérieur de la cavité nasale et d’en évacuer les agents infectieux. « Il faut utiliser un spray à base d’eau de mer hypertonique pour faciliter la décongestion, précise l’experte, et attention aux formulations, car certains laboratoires ajoutent des excipients parfois controversés. »
Et l’eau de mer ?
Pour les sprays, la mention « 100 % eau de mer non diluée » ou « eau de mer hypertonique » signale une eau de mer pure sans excipients nocifs. Sa concentration élevée en sels minéraux aide à décongestionner la muqueuse nasale plus efficacement que l’eau de mer « isotonique » (diluée avec de l’eau de source). En cas de nez très sensible et irrité, l’eau de mer isotonique est toutefois recommandée pour son affinité avec les fluides du corps humain.
En complément, on peut appliquer certaines huiles essentielles directement sur la peau. Chez un adulte de plus de 50 kilos, mélangez 4 gouttes d’HE de ravintsara, 4 gouttes d’HE d’arbre à thé et 4 gouttes d’HE d’eucalyptus radié, incorporez à une huile végétale puis appliquez 3 fois par jour durant 4 à 5 jours. Chez l’enfant (non asthmatique), dès 4 à 6 ans, optez pour les huiles essentielles d’eucalyptus radié et de thym à linalol diluées à 5 % dans un macérat huileux de calendula – très doux pour la peau – et massez le thorax et le haut du dos avec 4 à 5 gouttes de cette préparation. En revanche, si vous avez l’habitude de masser longuement, ou avec insistance, les ganglions du cou pendant ce type d’affection, sachez que ce n’est pas forcément utile.
Chez l’adulte, en posologie orale, Laure Martinat propose d’ingérer 1 goutte d’HE de thym à thujanol (Thymus vulgaris CT thujanol) dans une cuillerée de miel, 3 fois par jour, en plaquant bien la langue sur le palais pour diffuser dans la sphère ORL. Chez l’enfant en revanche, la médecin déconseille les huiles essentielles par voie orale en automédication. Préférez alors les hydrolats, sur la peau ou par voie orale. Plus doux, ils n’exposent à aucun risque. Plusieurs fois par jour, vous pouvez « débarbouiller » votre enfant avec un hydrolat de thym à linalol, un antiseptique très doux à l’effet protecteur qui limite la surinfection bactérienne des voies respiratoires. L’hydrolat de pin sylvestre est également sans danger chez l’enfant. Pour une ingestion orale, vous pouvez en vaporiser au niveau de la gorge, en spray, ou en ajouter une demi-cuillerée à café diffusée dans une boisson. « Attention à choisir votre hydrolat sans conservateur, à garder au réfrigérateur et à utiliser dans les 3 mois », précise-t-elle.
Apprenons aux enfants à se moucher correctement
Afin que toute la famille n’attrape pas le rhume, quelques gestes de prévention sont essentiels. Cessez toute consommation de tabac, aérez régulièrement les chambres et pièces de vie et maintenez-y une atmosphère fraîche, qui ne dépasse pas les 18 à 20 degrés. Préférez les mouchoirs en papier (ou lavez ceux en tissu à au moins 60 degrés), lavez-vous les mains à l’eau et au savon après chaque mouchage si possible et jetez vos mouchoirs dans une poubelle fermée. Concernant les enfants, apprenez-leur à se moucher afin d’éviter de laisser leur nez couler, évitez de les embrasser sur le visage et dans la nuque et veillez à ce qu’ils n’échangent pas leurs verres et couverts avec les autres.
« L’enfant peut développer des formes qui paraissent plus impressionnantes avec de la fièvre, mais le rhume reste une maladie bénigne », rassure Laure Martinat. La fièvre surtout est à surveiller, particulièrement chez le nourrisson qui y est très sensible et s’expose à un risque de convulsions. En raison d’une proximité plus grande entre le pharynx et l’oreille chez l’enfant, il arrive aussi que le rhume évolue en otite. Hors de ces cas, vous pouvez proposer des inhalations, dès l’âge de 4 ans, pour limiter le nez bouché et les mauvaises nuits qui vont avec.
Formule inhalation anti nez bouché pour les enfants dès 4 ans
Par Laure Martinat, médecin experte en aromathérapie
Propriétés : Antivirale, fluidifie les sécrétions, soutient l’immunité, aide à lutter contre la fatigue.
Indications : En cas de rhinopharyngite avec une sensation de nez bouché, avec ou sans sécrétions.
Inhalation
- HE d’arbre à thé Melaleuca alternifolia 20 gouttes
- HE de thym à linalol Thymus vulgaris CT linalol 20 gouttes
- HE d’eucalyptus radié Eucalyptus radiata 10 gouttes
Procédé de fabrication : Verser les huiles essentielles dans un flacon en verre teinté. Mélanger après avoir refermé le flacon.
Posologie et utilisation : Verser 1 à 2 gouttes du mélange dans une tasse d’eau chaude ou un inhalateur. Faire réaliser une inhalation à l’enfant durant 5 minutes, yeux fermés, un linge sur la tête. À faire 2 à 3 fois par jour pendant 3 à 5 jours, sous la surveillance d’un adulte.
Précautions d’emploi : À partir de 4 ans. Ne pas utiliser en cas d’asthme ou d’allergie.
1 ml = 25 gouttes HE = huile essentielle
Huiles essentielles, eau de mer et hydrolats
Quoi qu’il en soit, sachez que la durée normale d’un rhume est généralement de cinq à sept jours, dix au maximum. S’il persiste au-delà de cet horizon ou se répète, vous souffrez sûrement de rhinite chronique inflammatoire. Par ailleurs, assez ironiquement, ce dernier peut apparaître suite à l’usage abusif de médicaments vasoconstricteurs comme ceux cités plus haut. Si vous souffrez de cette forme chronique, les deux formules d’inhalations proposées sont également indiqués pour déboucher le nez. Il faut aussi savoir que la rhinite chronique inflammatoire survient généralement sur un terrain allergique sous-jacent qu’il faudra traiter pour être efficace sur le long terme. Il sera alors également utile de rechercher une carence en fer ou en zinc, de limiter le stress (qui impacte l’immunité) ou de vérifier que votre chauffage n’est pas trop agressif ou mal réglé (ce qui peut entraîner une sécheresse chronique des muqueuses, favorisant la sensibilité aux polluants et aux virus).
Enfin, en cas de Covid‑19 avec affection rhinopharyngée, Laure Martinat précise que tous les remèdes cités sont également efficaces. Les huiles essentielles antivirales comme celle de ravintsara ou d’eucalyptus radié feront, en plus, d’une pierre deux coups en vous aidant à lutter contre le virus. En complément, que ce soit pour un simple rhume ou pour le Covid, il sera toujours intéressant de coupler ces traitements d’aromathérapie avec de la phytothérapie visant à soutenir l’immunité. L’échinacée ou le cyprès sont alors tout indiqués.
Cou, dos, thorax, où appliquer les huiles essentielles ?
On pourrait penser que masser les ganglions, ces « filtres » qui nettoient notre lymphe pour en éliminer virus, bactéries et corps étrangers, est une bonne idée. Pour Laure Martinat, si la pratique n’est pas risquée, elle est inutile : « Les ganglions étant gonflés en réaction à l’infection virale, les masser ne changera rien à l’issue de la maladie. Les huiles essentielles passant dans tout le corps, il n’y a pas besoin de cibler particulièrement. » La zone peut, par ailleurs, être douloureuse, ce qui n’est pas agréable. Chez l’adulte, pour toucher la sphère respiratoire, appliquez les huiles essentielles sur le haut du dos, le cou et le thorax. Chez l’enfant très jeune, préférez un endroit qu’il ne peut pas atteindre comme le dos – voire les pieds, à recouvrir ensuite d’une chaussette – faute de quoi il risque de toucher la zone puis de se gratter les yeux, qui le piqueraient.