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Cueillir le génépi : légende des cimes

génépi
génépi

Cette plante fabuleuse se rencontre au creux des rochers escarpés des plus hauts sommets des Alpes. En plus de son goût aromatique puissant, l'indomptable génépi possède bien des vertus thérapeutiques. 

Comme beaucoup je pense, j’ai entendu parler du génépi avant de le rencontrer. À l’instar du mystérieux edelweiss, il était le héros de gestes montagnardes que me contait ma mère dès mes plus tendres années. Il était question d’une plante merveilleuse que les alpinistes – dont elle faisait partie – allaient cueillir sur les rochers escarpés au péril de leur vie pour préparer une liqueur qui faisait des envieux. Il était hors de question pour moi, bambin, d’accompagner ma mère pour gravir les sommets, ni, bien sûr de goûter la préparation alcoolique parfumée – quoique je le fis, je crois, avant d’atteindre un âge très raisonnable… Et si l’edelweiss nous apparaissait parfois au détour d’un sentier alpin, je dus attendre bien plus longtemps pour rencontrer le fabuleux génépi.

C’est sur un petit sommet des Alpes ­valaisannes, l’Illhorn, qui ne culmine guère qu’à 2 700 mètres, que je fis un beau jour d’été sa connaissance. J’en avais tellement entendu ­parler et j’avais observé sa photo sur les ouvrages de ­botanique que je l’aurais reconnu entre mille, mais il y avait de quoi être un peu déçu. Imaginez une plante rabougrie de quelques centimètres de hauteur, une touffe grise blottie au creux d’une ­fissure schisteuse d’où partaient dans tous les sens quelques tiges grêles munies de minuscules pompons jaunes. Encore fallait-il l’attraper, ce à quoi je parvins à force de contorsions périlleuses – j’ai eu plus tard l’occasion de rencontrer une jeune femme dont l’ami s’était tué en allant récolter, imprudemment, du génépi : l’opération est loin d’être sans danger ! Mais en humant les quelques brins que je cueillis avec peine, je compris pourquoi tant de personnes a priori saines d’esprit prennent des risques pour s’approprier ce modeste végétal. Quel arôme extraordinaire ! Il me rappelait, mais en plus céleste encore, le divin parfum de l’absinthe, l’un de mes favoris...

entre tous.

Intrigué par cette comparaison olfactive, je mâchai une inflorescence, m’attendant à ­ressentir l’amertume intense de la plante jadis interdite. Mais il n’y en avait pas trace : juste un goût ­aromatique très plaisant. Ce sont ces deux ­caractéristiques qui font le succès du génépi : contrairement à l’absinthe qu’il faut nécessairement distiller pour éliminer les lactones sesquiterpéniques qui lui confèrent son acrimonie, on peut simplement mettre le génépi à macérer dans de l’alcool avec un peu de sucre. La recette que se transmettent depuis des générations les habitants des montagnes est, à mon avis, plus symbolique que parfaite. Pour un litre d’alcool de grains type vodka titrant une quarantaine de degrés, on ajoute quarante brins de génépi et quarante morceaux de sucre, qu’on laisse tremper… quarante jours, vous l’auriez deviné ! Personnellement, je préfère utiliser de l’alcool plus fort, qui extrait mieux, et en un rien de temps, les saveurs. Ah, que je vous dise, c’est interdit en France et en Suisse, mais parfaitement légal en Italie où les supermarchés piémontais regorgent de bouteilles d’alcool renfermant jusqu’à 98 % d’éthanol. Pour être en règle en rentrant au pays, il suffit de diluer votre produit fini, ce qu’il faut de toute façon faire pour le consommer… Si vous souhaitez mettre à profit le génépi sans employer d’alcool, vous pouvez en parfumer avec succès des sauces et des desserts.

Mais soyons précis : il n’y a pas un, mais des génépis, ce qui explique que les liqueurs que l’on prépare puissent être fort différentes. Et c’est bien le problème, car les dénominations populaires liées à la couleur sont très floues : qu’est-ce que le génépi blanc, le gris ou le noir ? Seuls les botanistes s’y retrouvent, puisqu’ils n’ont qu’un nom unique pour chaque espèce, différenciée des autres par des critères détaillés.

Génépi

Plus précis dans leur approche que les cueilleurs, ils distinguent huit espèces de ces petites armoises montagnardes et aromatiques qui font nos délices. Les plus courantes sont le génépi vrai, le génépi en ombelle, le génépi des glaciers et le génépi laineux. Quoi qu’il en soit, toutes sont protégées, car un ramassage excessif pour aromatiser des liqueurs a considérablement raréfié leurs stations. La législation en réglemente la récolte et il est essentiel de la connaître et de l’appliquer. Enfin, la délicieuse liqueur de génépi – quelle que soit l’espèce avec laquelle on l’aura préparée – possède des vertus tonifiantes, stomachiques, emménagogues, et fébrifuges. Ce n’est pas une raison pour en faire un usage autre que modéré…

herbier

Génépi blanc (artemisia umbelliformis)Le génépi blanc (Artemisia umbelliformis) est une petite plante vivace de 5 à 20 cm formant des touffes compactes. Ses feuilles finement découpées, grises et soyeuses, sont réunies en rosettes denses. De leur centre part un bouquet de tiges ­dressées, grêles, mais solides, portant en grappe lâche quelques petits capitules de fleurs en tubes jaunâtres entourés d’un involucre de courtes ­bractées ­imbriquées. Les capitules inférieurs sont écartés, les supérieurs rapprochés les uns des autres. Leur floraison a lieu de juillet à août. On rencontre la plante sur les rochers d’altitude dans les Alpes et les Pyrénées. Les autres espèces de nos régions sont les suivantes : A. atrata (Alpes), A. borealis (Alpes), A. eriantha (Alpes et Pyrénées), A. genipi (Alpes et Pyrénées), A. glacialis (Alpes), A. nivalis (Alpes) et A. vallesiaca (Alpes).

Recette sauvage : Flan parfumé au génépi

Pour 4 ramequins 1 poignée de génépi • 300 ml de lait de riz • 1,5 g d’agar-agar • 20 g de sucre • jus de citron.

  1. Coupez grossièrement le génépi et séparez-le en trois tas.
  2. Dans une casserole, mélangez, à froid, un tas de génépi avec le lait de riz, l’agar-agar et le sucre. Portez à ébullition.
  3. Retirez du feu, ajoutez le deuxième tas de plante et couvrez.
  4. Une fois que le liquide a refroidi à 60 °C, ajoutez le troisième tas et mixez.
  5. Ajoutez le jus de citron.
  6. Versez dans des ramequins en filtrant et laissez refroidir au frais.
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