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Le nombril de Vénus : une salade craquante

Nombril de Vénus
Nombril de Vénus

Peu connu, mais toujours surprenant, tant à l'œil qu'aux papilles, le nombril de Vénus ne peut laisser indifférent. Ses jolies feuilles rondes méritent d'être observées, cueillies, et croquées avec respect. Par François Couplan

Lorsque j’étais enfant, je n’avais guère ­l’occasion de rencontrer cette petite ­merveille. Ce n’est que sur les vieux murs en pierres sèches siliceuses des hauteurs surplombant Vichy, où vivaient mes grands-parents, que je pouvais admirer ces curieux ­ « boutons des murailles ». Je les avais surnommés ainsi, car je n’en connaissais pas encore le joli nom populaire – à moins que ma mère, tout de même assez prude, ait fait semblant de l’ignorer pour ne pas me donner de fâcheuses idées érotiques…

Bref, je me contentais d’en grignoter au ­passage les feuilles charnues, juteuses et ­acidulées. Ce n’est que plus tard que j’en découvris le ­potentiel « saladesque » en les cueillant à foison sur les rochers ombragés et humides de Bretagne, de Corse ou des Monts du Lyonnais. J’en rencontrai de tailles diverses, de la grosseur d’une pièce d’un franc à celle d’une soucoupe. Et j’en fis toutes sortes de salades. C’est vraiment l’une des meilleures plantes que l’on puisse imaginer pour cela, et je m’étonne qu’elle ne soit pas plus connue, car elle apporte ce côté rafraîchissant, tendre et croquant à la fois que l’on recherche dans ces plats qui contrebalancent des nourritures plus lourdes. Le nombril de Vénus est une excellente base pour les salades composées et j’aime y mêler les ingrédients les plus variés – laitue, tomate, concombre, fromage ou olives : tout se marie à merveille avec lui. Je farcis aussi ces jolies feuilles rondes et creuses de purée d’avocat, de fromage blanc aux herbes, d’houmous de pois chiche ou d’un mélange de crème de sésame et de miso, selon les régions du monde que j’ai envie d’explorer. Il m’est également arrivé de les ­conserver au vinaigre – mais il ne faut pas les y garder trop longtemps, car elles se ramollissent.

Les feuilles d'Umbilicus rupestris sont excellentes crues en salade

La simple observation des feuilles de cette curieuse plante explique son nom : elles sont rondes, avec une dépression au centre, là où ­s’attache...

le pétiole sur la face inférieure. L’évocation d’un nombril, umbilicus en latin (qui signifie également « petit cercle ») tombe sous le sens. Est-il aussi beau que celui de Vénus ? Les botanistes utilisent en tout cas le terme d’ « ombiliqué » pour décrire cette forme de feuille. Son côté charnu est une adaptation aux conditions qui règnent dans l’environnement particulier où pousse la plante, qui lui permet de stocker l’eau en cas de sécheresse prolongée – c’est le même principe qu’adoptent les cactus des déserts d’Amérique. L’épithète rupestris indique son habitat sur les parois, rupes en latin.

Lorsque la plante se développe, apparaît à son sommet une ou plusieurs tiges dressées portant à la base des feuilles de taille réduite et une longue grappe de petites fleurs jaunâtres. L’aspect de ces inflorescences strictement dressées ou parfois un peu ondulées est particulièrement esthétique, je trouve. En revanche, elles sont amères et peu ­plaisantes à manger. Il arrive d’ailleurs, mais dans mon expérience c’est rare, que les feuilles soient, elles aussi, teintées d’amertume.

Recette sauvage : Salade de nombril de Vénus

Ingrédients Un saladier de feuilles de nombril de Vénus cueillies avec le sommet du pétiole • Un petit yaourt de soja • 2 cuillerées à soupe d’huile d’olive • Un jus de citron • Une poignée de cerneaux de noix • Une pincée de sel.

  1. Coupez grossièrement les feuilles de nombril de Vénus, en laissant les plus petites entières.
  2. Mettez tous les autres ingrédients dans le bol d’un robot de cuisine, puis mixez.
  3. Servez les feuilles nappées de la sauce aux noix.

L’un de mes jeux favoris consiste à retirer délicatement l’épiderme d’une feuille ­d’ombilic, ce qui demande un doigté certain, et de la poser sur ma peau où elle se colle. Au-delà de ­l’amusement, c’est un bon moyen d’aider les plaies à ­cicatriser ou de calmer la douleur des brûlures : j’ai eu ­l’occasion d’en vérifier l’efficacité dans ma ­cuisine… En fait, le nombril de Vénus agit, semble-t-il, comme les célèbres aloès (Aloe vera) dont le gel possède des vertus ­thérapeutiques réputées. Et l’on ne peut pas faire plus local !

J’avais eu jadis l’occasion d’accompagner un éminent ethnobotaniste qui m’avait expliqué qu’en Bretagne, d’où il était originaire, les feuilles servaient à graisser les poêles, en particulier pour les « culotter » lorsqu’elles étaient neuves, afin d’éviter que les aliments n’y attachent à la cuisson : on les écrasait en une masse gélatineuse que l’on frottait au fond de la poêle avec un chiffon.

La plante est riche en mucilages qui lui confèrent des vertus adoucissantes. Son goût acidulé provient d’acides organiques qui s’accumulent au cours de la photosynthèse de la plante : on parle de « métabolisme acide crassulacéen », du nom de la famille, les crassulacées, dont la ­plupart des membres sont charnus –  crassus en latin ­signifie « charnu ».

François Couplan organise des stages de découverte des plantes sauvages comestibles et médicinales, ainsi qu’une formation complète sur trois ans. Il est l’auteur de nombreux ouvrages. Plus d'infos sur www.couplan.com

Herbier

L’ombilic ou nombril de Vénus (Umbilicus rupestris) est une petite plante vivace de 10 à 40 cm, totalement glabre et charnue. La plupart des feuilles partent de la base. Supportées par un long pétiole central, elles ont une forme circulaire, une marge crénelée, une texture épaisse et cassante et une couleur verte, luisante. Elles se teintent souvent de rouge en fin de saison. Les tiges portent quelques feuilles, plus petites et de forme lancéolée, voire linéaire, ainsi qu’une multitude de fleurs ­pendantes, à corolle en tube d’un blanc jaunâtre, formant une longue grappe de bas en haut de la tige. Elles apparaissent de mai à août. Les fruits, des capsules renfermant de nombreuses graines, mûrissent au cours de l’été. La plante pousse dans les ­fissures des vieux murs et des rochers humides et ­ombragés des terrains siliceux, dans l’Ouest, le Sud-Ouest, le Centre et le Midi, y ­compris en Corse. On pourrait la confondre avec l’écuelle d’eau ­(Hydrocotyle vulgaris) dont les feuilles sont, elles aussi, rondes, mais plus minces. Et cette dernière vit au sol, les pieds dans l’eau. Elle est aussi comestible.

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