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Pour une production locale des huiles essentielles

Camomille

Située à une soixantaine de kilomètres au sud de Paris, Milly-la-Forêt est une commune historiquement connue pour sa menthe poivrée. Mais c'est peut-être grâce à une toute nouvelle filière d'huiles essentielles que ce territoire de l'Essonne va reprendre une place de choix dans le domaine de la santé… en misant sur des plantes méditerranéennes !

" Produire local " est le nouveau mot d'ordre de nombreux domaines. En phytoaromathérapie, la marge de progrès est importante puisqu'environ 80 % des plantes médicinales vendues en France sont importées. Or à Milly-la-Forêt, en Île-de-France, une filière d'huiles essentielles locales est en train de voir le jour : les quatorze agriculteurs du groupement MillyPPAM réaliseront en 2021 leur troisième récolte de thym à thujanol, de camomille romaine et d'origan, qu'ils distilleront eux-mêmes. Ce n'est pas par hasard si ces céréaliers du Gâtinais, un territoire situé entre la Beauce et la Brie, ont choisi de semer et planter des aromatiques. La région était autrefois un berceau de plantes médicinales : en 1930, une centaine de familles de producteurs en cultivaient, notamment de la « menthe de Milly », une variété de menthe poivrée. Deux petites herboristeries, encore ouvertes sur la place centrale de Milly-la-Forêt, témoignent de ce passé dédié aux simples. Mais dans les années 1960, cette production de plantes médicinales fut délocalisée, notamment vers l'Europe de l'Est, reléguant les terres du Gâtinais aux grandes cultures céréalières et betteravières.

Thym, origan, camomille… à la recherche de la qualité

La filière s'était donc quasiment éteinte, mais en 2012 le Conservatoire national des plantes médicinales de Milly-la-Forêt a débuté des essais de culture dans trois exploitations agricoles. L'objectif : réintroduire les plantes médicinales dans le terroir du Gâtinais sachant que des plantes méditerranéennes telles que la lavande y étaient déjà cultivées dans les années 1930. Le Conservatoire et les producteurs du groupement MillyPPAM se sont concentrés sur des espèces recherchées en aromathérapie : « Nous voulons répondre aux attentes sociétales », justifie l'agriculteur Thomas Palfroy pour expliquer le choix des huiles essentielles plutôt que des plantes sèches. De plus, ces médicinales aromatiques ont de l'intérêt par rapport aux dérèglements climatiques auxquels le monde paysan est confronté tous les jours depuis plusieurs années : « L'avantage avec ces plantes aromatiques est qu'elles expriment le mieux leur potentiel lors des coups de chaud », a constaté Thomas Palfroy.

« Le thym à thujanol est l'une des cultures qui est rapidement sortie du lot car il donne une huile essentielle de très bonne qualité ici », confie Mathilde Berchet, responsable de la distillerie MillyPPAM. Lorsqu'on porte à ses narines le petit flacon bleu obtenu, on perçoit des arômes à la fois puissants et ronds, témoignant d'un bon équilibre entre les différentes molécules actives. L'essence de camomille romaine sent aussi exceptionnellement bon, avec ses notes de pomme acidulée. « Pour monter une filière, il faut être sûr de la qualité que l'on obtiendra, afin que les potentiels acheteurs puissent se positionner », explique Mathilde Berchet. La gamme actuelle compte une dizaine d'huiles essentielles, incluant bien sûr celle de menthe poivrée, très recherchée en aromathérapie pour sa richesse en menthol tandis qu'elle contient peu de menthone.

Au service de la biodiversité

Produire des plantes aromatiques dans un terroir, ce n'est pas seulement augmenter la biodiversité agricole : avec leurs floraisons qui s'étalent de mai à septembre, ces cultures font le bonheur des abeilles. Un partenariat entre le groupement MillyPPAM et des apiculteurs d'Île-de-France a ainsi été mis en place, leur permettant d'installer leurs ruches sur les parcelles. « Les abeilles aident à polliniser nos champs et produisent un miel de qualité », se réjouit Thomas Palfroy. L'agriculteur pointe d'autres bénéfices environnementaux : « Ce sont des cultures qui nécessitent très peu d'intrants [engrais, produits phytosanitaires, etc., ndlr], qu'elles soient conduites ou non en bio ».

De la pépinière au flacon

L'agriculteur Thomas Palfroy consacre six des deux cents hectares de son exploitation aux plantes médicinales. Il produisait déjà des bouquets de plantes aromatiques, ainsi que du blé, de l'orge brassicole, du colza, du tournesol, de la féverole, de la moutarde, du pois protéagineux ou encore des plants de pomme de terre. « Comme les autres agriculteurs du projet, je suis animé par la volonté de me diversifier davantage, en consacrant les sols plus légers et bien drainants de ma ferme au thym ou à l'origan », confie ce producteur dont l'ambition est de passer à terme à soixante hectares de plantes médicinales, soit presque le tiers de ses terres. « Il y a une bonne complémentarité avec mes autres cultures : la récolte de thym par exemple, qui a lieu en mai, au moment de la floraison de la plante, se fait en dehors des pics de travail. »

« 100 % de nos plants de thym proviennent de notre région », précise Thomas Palfroy pour illustrer la volonté de parvenir à une filière la plus locale possible : pour cela, un partenariat avec des horticulteurs d'Île-de-France a été noué. Même la mise en flacon des huiles essentielles est réalisée à Milly-la-Forêt, assurée par l'entreprise d'aromathérapie Eona qui s'y est implantée il y a quelques années. Les débouchés sont variés avec de la vente directe sous la marque « Milly Sens » via des boutiques locales, mais aussi les laboratoires pharmaceutiques, les parfumeurs, ainsi que les entreprises fabricant des lessives puisque ces quatorze agriculteurs cultivent aussi du lavandin. De nouveaux essais de cultures ont d'ores et déjà été lancés. Ainsi, l'achillée millefeuille et l'angélique seront distillées dès cet été. C'est souvent par l'exemple que l'on convainc le mieux : de quatorze producteurs, le projet va passer à vingt-huit à l'horizon 2022.

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