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La matricaire une odeur d’ananas

La matricaire

On peut être petit au point de se faire fouler aux pieds, avoir des fleurs tronquées, ne ressembler à rien et être pourtant l’une des plantes les plus aromatiques de nos régions, riche en possibilités culinaires et médicinales. C’est le cas de la matricaire.

Celle-là, je m’en souviens depuis ma plus tendre enfance. Elle poussait un peu partout au bord, et même en plein milieu des chemins de mon coin favori du Beaufortain, où je passais mes vacances à jouer dans la nature. Comme je n’étais pas bien grand, j’étais presque au niveau de ce modeste végétal aux feuilles découpées, surmonté de petits boutons jaunâtres que je trouvais amusant d’écraser entre mes doigts pour en faire jaillir un parfum fruité. Ce n’est que bien plus tard que je rencontrai un nom adéquat pour cette plante odorante : aux États-Unis, on la nomme « pineapple weed », l’herbe-ananas, ce qui me semble tout à fait justifié. Elle est originaire de la côte Pacifique Nord de l’Amérique septentrionale, ainsi que de l’extrême Est de l’Asie. Mais sa présence en Europe remonte à plusieurs siècles. Et elle semble bien s’y plaire !

Il faut dire que la matricaire se contente de peu et fait preuve d’une résistance à toute épreuve. J’ai toujours été épaté par sa capacité à se développer sur les terres rendues compactes par le piétinement du bétail ou les roues des voitures, qui éliminent impitoyablement tout autre végétal, à l’exception du grand plantain (Plantago major), qui pousse couramment avec notre plante. Les chemins ne manquent pas d’intérêt !

Naguère, mon usage culinaire de la matricaire se résumait à mâchonner les capitules pour l’agréable sensation qu’ils procurent. En effet, ils ne se contentent pas d’être aromatiques, mais provoquent un curieux picotement et une...

salivation qui exacerbe les saveurs, tout comme – mais à un plus fort degré – les capitules du célèbre légume malgache anamalaho (Spilanthes acmella), qui donnent l’impression d’une petite pile électrique lorsqu’on les croque. Cet « effet trigéminal » a la propriété d’exalter les papilles et de prolonger les goûts en bouche, ce qui n’est pas sans intéresser les fabricants d’arômes…

Pour ma part, je fais très simple : je me contente d’ajouter quelques capitules aux salades de légumes ou de fruits, j’en fais de délicieux apéritifs, avec ou sans alcool, ou j’en extrais la subtile saveur pour réaliser des desserts – flans, crèmes ou sorbets. Mais attention, les tiges et les pédoncules sont très solides, et on a tôt fait d’arracher la plante lorsqu’on veut les cueillir…

La matricaire est une camomille, mais elle est nettement moins connue que ses cousines la camomille romaine (Chamaemelum nobile, auparavant Anthemis nobilis) et la camomille allemande (Matricaria chamomilla), voire que la grande camomille (Tanacetum parthenium) – alors qu’elle est pourtant beaucoup plus répandue. C’est sans doute parce que, d’une part notre plante est une nouvelle venue, et que, d’autre part, ses propriétés médicinales sont nettement moins marquées que celles des autres espèces, ce qui se reconnaît à sa saveur douce – alors que les autres camomilles sont très amères. La matricaire se montre toutefois légèrement digestive et anti-inflammatoire, vertus que l’on retrouve dans les apéritifs et les desserts où elle sert d’ingrédient : se soigner en mangeant est, je trouve, une excellente chose !

Herbier

La matricaire odorante est une petite plante dont la tige dressée, rigide, ne dépasse guère 20 cm. Ses feuilles sont finement découpées en segments filiformes et dégagent une faible odeur lorsqu’on les froisse. Ce sont surtout les capitules qui sont aromatiques. Le réceptacle a la forme d’un cône couvert d’une multitude de toutes petites fleurs en forme de tubes, munies de cinq dents d’un jaune verdâtre. Les fleurs ligulées sont absentes, ce qui fait souvent dire que « les fleurs de la matricaire ne s’ouvrent pas ». Cette affirmation n’est pas juste : on prend généralement le capitule (qui est une inflorescence) pour une fleur et les fleurs ligulées, blanches, des marguerites pour des pétales – alors que ce sont des fleurs à part entière, inexistantes chez la matricaire. La plante pousse un peu partout dans les décombres, les terrains compactés, les chemins, les bords des routes, etc. Elle est extrêmement répandue.

Recette sauvage – Apéritif de matricaire

Ingrédients
• 1 bouteille de vin blanc
• 1 l de jus de pomme
• 1 citron
• 1 grosse poignée de capitules de camomille matricaire
• ½ l d’eau gazeuse

1. Versez le vin et le jus de pomme dans un grand récipient
2. Coupez le citron en morceaux, avec le zeste, hachez les capitules de matricaires, ajoutez au mélange et mixez.
3. Laissez reposer une heure au frais
4. Filtrez sur une passoire fine.
5. Ajoutez l’eau gazeuse sortant du réfrigérateur.

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