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Cueillir et cuisiner le cranson

Cueillir et cuisiner le cranson

Prononcer son nom risque de faire s'écarquiller les yeux de vos amis… Pourtant, cette plante a sauvé la vie de milliers de voyageurs au long cours, lancé la recherche médicale moderne… et permis de découvrir l'Amérique ! Elle mérite donc d'être connue.

Pendant longtemps, le cranson (Cochlearia officinalis) est resté, dans mon imaginaire, une plante mystérieuse. Je lisais dans les ouvrages anciens que cette crucifère commune sur nos côtes était récoltée en quantité par les navigateurs pour éviter une grave maladie qui faisait rage au sein des équipages, le scorbut. Mais je n’eus pas l’occasion de la rencontrer très tôt dans mes explorations botaniques. Il est vrai qu’elle n’est pas bien grande et se cantonne aux falaises littorales, un milieu particulièrement rude qu’elle partage avec la criste marine (Crithmum maritimum), plus voyante. La plante se niche dans les anfractuosités des rochers soumis aux embruns, où ses racines trouvent une maigre pitance et ses feuilles deviennent charnues pour résister à la dessiccation due au sel et au soleil.

Le cranson forme de petites touffes, çà et là, et il faut s’en approcher pour observer la forme originale de ses feuilles basales : elles sont plus ou moins creusées et peuvent évoquer une cuillère, d’où le nom scientifique de la plante, du latin cochlea, « cuillère » – l’un de ses noms populaires est d’ailleurs « herbe-aux-cuillères »… Les fleurs, à quatre pétales en croix, portées en grappes trapues, indiquent la famille des brassicacées ou crucifères (« porte-croix » en latin).

Cueillette

  • Feuilles : idéalement d’avril à juillet-août. Mais selon l’emplacement, on pourra en trouver toute l’année.

Comme beaucoup de ces plantes, le cranson possède une saveur piquante très marquée : c’est un cousin de la moutarde et du raifort. On peut donc utiliser ses feuilles comme condiment. Je les trouve certes un peu longues à récolter, mais j’en prends le temps, car j’aime en faire du pesto ou les mêler à d’autres plantes dans des salades au caractère marqué.

Du fait de sa teneur élevée en vitamine C et de sa présence sur les côtes, le cranson était fréquemment embarqué à bord des navires pour lutter contre le scorbut, une terrible maladie qui décimait les marins. Le scorbut résulte d’une carence prolongée en acide ascorbique dans...

l’alimentation. Cette vitamine est un nutriment essentiel pour le corps humain et nous ne savons pas la stocker – preuve que notre nourriture naturelle était riche en cette vitamine, abondante dans toutes les feuilles vertes de plantes sauvages, ainsi que dans certains fruits. La vitamine C joue un rôle crucial dans la synthèse du collagène, une protéine fibreuse présente dans la peau, les tendons, les os, les ligaments et les vaisseaux sanguins. C’est également un antioxydant puissant qui contribue au bon fonctionnement du système immunitaire.

Une carence en vitamine C affaiblit les tissus conjonctifs et provoque divers symptômes inquiétants : on constate une fatigue et une faiblesse marquées, une anémie (manque de globules rouges), des douleurs articulaires et musculaires, un gonflement des gencives accompagné de saignements, le déchaussement puis la perte des dents, des ecchymoses et des petits saignements sous la peau, ainsi qu’un retard de cicatrisation des plaies et des fractures osseuses.

Le scorbut était autrefois une maladie courante chez les marins qui entreprenaient de longs voyages en mer, car ils n’avaient pas accès, parfois pendant de longs mois, à des aliments frais riches en vitamine C. Il a marqué l’histoire de la marine à voile, particulièrement entre le XVe et le XVIIe siècle, lors des grandes expéditions maritimes lancées à travers le monde par les Européens.

Herbier

Le cranson officinal (Cochlearia officinalis) est une petite crucifère glabre bisannuelle ou vivace de 10 à 25 cm. Sa tige est étalée puis redressée. Les feuilles de la base, munies d’un long pétiole, sont arrondies en cœur. Les feuilles de la tige embrassent cette dernière par 2 oreillettes et sont bordées de 2 ou 4 larges dents arrondies. Elles sont un peu charnues. Les fleurs légèrement odorantes sont assez grandes, blanches, avec 4 pétales en croix, plus longs que les sépales, et 6 étamines. Réunies en une courte grappe au sommet de la tige, elles fleurissent de mars à juillet. Les fruits sont des silicules globuleuses. La plante est commune sur les rochers des côtes de la Manche et de l’océan. On la rencontre aussi dans les Pyrénées centrales, en Auvergne et en Alsace. Elle est native dans le nord, l’ouest et le centre de l’Europe. Quatre espèces voisines poussent en France : Cochlearia anglica, C. danica et C. aestuaria (Bretagne, Pyrénées-Atlantiques) et C. pyrenaica (C. officinalis subsp. alpina).

La maladie peut être mortelle si elle n’est pas soignée à temps. Son traitement est pourtant simple, puisqu’il suffit de corriger la carence en vitamine C par la consommation d’aliments qui en sont suffisamment pourvus. En 1747, le médecin écossais James Lind mena une étude contrôlée, la première du genre, sur douze marins souffrant de scorbut, auxquels il administra différents traitements. Il constata que ceux qui recevaient des citrons présentaient une amélioration spectaculaire par rapport aux autres. La cause exacte du scorbut et l’importance de la vitamine C ne furent cependant pleinement comprises qu’au début du XXe siècle.

Bien que le scorbut soit généralement considéré comme une maladie du passé, il en existe encore de nos jours des cas sporadiques, même chez les jeunes. Ces incidents sont rares et surviennent généralement en raison de régimes extrêmement déséquilibrés, de troubles alimentaires ou de conditions médicales particulières qui affectent l’absorption ou l’utilisation de la vitamine C. Une consommation très limitée de fruits et de légumes frais, de hautes doses d’aliments transformés, la restauration rapide et les collations sucrées sont spécifiquement mis en cause. Les jeunes ayant ce genre d’habitudes alimentaires ou souffrant de troubles tels que l’anorexie ou la boulimie sont particulièrement à risque.

Le cranson renferme également des isothiocyanates au goût piquant qui possèdent des vertus apéritives, digestives et antiseptiques.

Recette sauvage

Ingrédients 1 poignée de feuilles fraîches de cranson • 1 concombre • 1 poivron rouge • 1 poivron jaune • 1 petit oignon rouge • 200 g de tomates cerises • 100 g de feta • 1 citron • 3 cuillerées à soupe d’huile d’olive • Un peu de sel.

  1. Laver les feuilles de cranson et les essorer délicatement, ainsi que les différents légumes.
  2. Couper le concombre en fines tranches et les poivrons en lamelles étroites.
  3. Émincer l’oignon rouge et couper les tomates cerises en deux.
  4. Émietter la feta en petits morceaux. 5. Dans un grand saladier, mélanger les feuilles de cranson avec les légumes. Ajouter la feta émiettée.
  5. Préparer une vinaigrette avec le jus du citron, l’huile d’olive et le sel.
  6. Verser la vinaigrette sur la salade et mélanger délicatement pour bien enrober tous les ingrédients.
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