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Cueillir et déguster l'aster maritime

Cueillir et déguster l'aster maritime

On se demande comment une plante peut croître dans des milieux aussi hostiles que les vases salées. Pourtant, certaines d'entre elles ont réussi à trouver les moyens de s'y adapter et semblent s'y plaire. C'est le cas de ce bel aster, qui présente également l'intérêt d'être comestible. Par François Couplan

Depuis l’enfance, j’ai toujours été plus attiré par la montagne que par la mer, et ce n’est que relativement tard dans ma vie que je me suis consacré à l’exploration du littoral en allant y donner des stages. Lors de mes premières sorties, je me contentais de récolter les emblématiques salicornes et cristes-marines. Mais j’avais appris dans la grande encyclopédie de Désiré Bois que bien d’autres végétaux d’affinités marines pouvaient faire l’objet d’une cueillette alimentaire et je décidai d’aller les découvrir. L’une d’elles était un aster – une composée en termes anciens –, aux jolies fleurs violettes. Comme mes balades maritimes s’opéraient surtout au printemps, je ne les avais jamais remarquées. Il me fallait donc trouver un moyen de les repérer en cette saison. Pas si simple !

On m’avait montré un légume sauvage localement apprécié sur les côtes du Morbihan sous le nom amusant d’« oreilles de cochon ». Il s’agissait d’une plante aux longues feuilles épaisses et sans nervures visibles – possiblement évocatrices des appendices auditifs des porcs… – qui jaillissait en grosses touffes de la slikke vaseuse, cette vaste étendue de boue noirâtre des marais salants et des estuaires, recouverte deux fois chaque jour par les marées. Croquantes, juteuses et savoureuses, elles me plurent beaucoup. Au-delà de leur goût salé, j’y retrouvai un arôme caractéristique de marguerite, signe d’une appartenance manifeste à la grande famille des astéracées. En me documentant plus avant, je conclus que c’était bien là le végétal que je recherchais, alors connu par les botanistes comme l’Aster tripolium – dont le nom a depuis été modifié en Tripolium ­pannonicum – bien que je ne puisse voir le rapport avec la Pannonie, ancienne région à cheval sur la Hongrie, l’Autriche, la Slovénie et la Croatie…

© François CouplanIl m’arriva par la suite de me rendre au même endroit en fin d’été. Ces mornes surfaces, d’un vert grisâtre au printemps, s’étaient transformées en un immense tapis coloré de capitules aux ligules mauve pâle entourant un cœur de tubules jaunes – superbe, une vraie plate-bande...

d’ornement ! C’est alors que l’on distingue aisément notre aimable végétal d’un sosie presque parfait, plus compliqué à identifier avant la floraison. J’avais remarqué, en effet, qu’aux feuilles charnues des asters se mêlait une verdure plus claire de lames minces. J’avais beau avoir attiré l’attention de mes élèves sur cette ressemblance, il n’était pas rare que je retrouve au milieu des bouquets d’oreilles de cochon quelques spécimens de cette trompeuse « lavande de mer », car tel est le nom de l’usurpatrice – qui n’a rien à voir d’un point de vue botanique avec l’aromatique montagnarde. Limonium vulgare est son appellation officielle et elle appartient à la famille confidentielle des plombaginacées. Un bon point : elle n’est en rien toxique, et une confusion n’entraînerait aucune conséquence gravissime. Ses feuilles sont plutôt coriaces, assez sucrées et au final pas mauvaises du tout. Lorsqu’elle fleurit, on la remarque de loin avec ses grandes inflorescences formées de bractées bleu violacé d’une consistance de papier entourant de petites fleurs plus foncées. Comme la couleur de sa floraison se maintient dans le temps, on en confectionne des bouquets secs d’un fort joli effet.

Cueillette

  • Feuilles : avril à octobre (avant les gelées). 

Mais revenons-en à nos asters. Je cueille donc les feuilles in situ, de préférence avant que la plante ne s’épanouisse, car elles sont alors plus tendres, et les utilise fraîches, en salade ou comme légumes. J’en ai fait à l’occasion de bonnes soupes, mais je ne profite plus dans ce cas de leur texture épaisse et légèrement croquante. Il est préférable d’ailleurs de ne pas trop les cuire : un aller-retour dans la poêle suffit, ou quelques minutes à la vapeur douce. Et je les sers avec un généreux morceau de beurre non salé : il est en effet inutile, voire déconseillé, de les relever de chlorure de sodium : elles en contiennent bien assez, vu le lieu où elles poussent.

Sur le plan écologique, l’aster maritime joue un rôle important dans les écosystèmes côtiers en offrant une protection contre l’érosion et en fournissant habitat et nourriture à de nombreuses espèces de la faune sauvage, y compris les oiseaux migrateurs et insectes pollinisateurs. Comme pour toute cueillette, il faut donc se montrer parcimonieux, même si la ressource semble inépuisable : elle ne l’est pas. Et, comme souvent, il sera souhaitable de s’assurer que la récolte s’effectue loin de toute source de pollution.

herbier

L’aster maritime (Tripolium pannonicum) est une plante bisannuelle de 30 à 80 cm, à tige simple ou rameuse dès la base, dressée ou ascendante, glabre. Ses feuilles sont charnues, très glabres, celles de la base oblongues-obovales, longuement pétiolées, celles de la tige plus étroites. Les capitules comportent à la périphérie des ligules – manquant parfois par avortement – violettes, blanches ou blanc lilas, et au centre des tubes jaunes. Ils sont entourés d’un involucre formé de bractées glabres, ciliées au sommet. Les capitules, qui s’épanouissent de juillet à octobre, sont regroupés en une panicule ressemblant à un corymbe, avec des pédicelles pourvus de quelques bractéoles. Les soies de l’aigrette des fruits, des akènes, sont blanches. La plante forme des colonies dans les prés maritimes et marais salés du littoral de la Méditerranée, de l’océan Atlantique et de la Manche. On la rencontre aussi près des sources salées de la Lorraine. L’aster maritime est répandu sur tout le littoral européen, ainsi qu’en Afrique du Nord.

Recette sauvage

Ingrédients 1 rouleau de pâte feuilletée • 2 cuillerées à soupe d’huile d’olive • 1 oignon rouge • 200 g de feuilles d’aster maritime • 150 g de fromage de chèvre frais • 2 œufs • 100 ml de crème fraîche • Sel et poivre.

  1. Préchauffer le four à 180°C.
  2. Disposer la pâte feuilletée dans des moules individuels en relevant les bords.
  3. Piquer légèrement le fond de chaque tartelette avec une fourchette et les placer au réfrigérateur.
  4. Dans une poêle, faire chauffer l’huile d’olive à feu moyen. Y faire revenir l’oignon émincé jusqu’à ce qu’il soit tendre.
  5. Ajouter les feuilles d’aster maritime, les faire cuire 2 minutes jusqu’à ramollissement.
  6. Dans un bol, battre les œufs et la crème fraîche. Saler et poivrer.
  7. Étaler le fromage de chèvre sur le fond de chaque tartelette.
  8. Répartir le mélange d’oignon rouge et de feuilles sur le fromage.
  9. Verser le mélange d’œufs et de crème fraîche sur chaque tartelette.
  10. Placer les tartelettes au four préchauffé et faire cuire 15 à 20 minutes.
  11. Après cuisson, laisser refroidir légèrement les tartelettes avant de les démouler.
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