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Cueillir l’obione, plante charnue et salée

Cueillir l’obione, plante charnue et salée

Elle a beau ne pas être la plus jolie plante du monde et pousser en des lieux peu hospitaliers, l'obione se distingue par sa remarquable capacité d'adaptation et le fait qu'elle se récolte toute l'année. C'est aussi un excellent légume sauvage, que l'on n'aura pas besoin de saler à la cuisson.

Lorsque les gens « normaux » se rendent au bord de la mer, ils prennent pour destination les plages sableuses bordées par les flots bleus. Personnellement, je leur préfère les falaises abruptes ou les estuaires et les marais littoraux, plus riches en plantes. Dans ces vastes étendues vaseuses, les bottes sont souvent nécessaires si l’on veut pouvoir résister à la succion angoissante du terrain détrempé… Mais c’est là que je rencontre des végétaux que j’admire pour leurs extraordinaires facultés d’adaptation, et que j’apprécie pour leur abondance et leur saveur plaisante.

Cueillette

  • Feuilles : toute l’année

Parmi ces plantes figure l’obione (Halimione portulacoides), nettement plus commune que belle. Elle étale sur le sol ses longues tiges entremêlées couvertes d’une multitude de feuilles épaisses d’un gris argenté. Son nom est l’ancienne dénomination latine du genre que les vicissitudes de la nomenclature botanique ont aujourd’hui transformée en « halimione ». Ce dernier terme dérive du grec ­halimos (lui-même tiré de halos, « sel »), qui désignait chez les Anciens l’arroche arbustive connue sous le nom de « pourpier de mer » (Atriplex halimus). Notons que l’épithète de notre plante, portulacoides, « qui ressemble au pourpier », va dans la même direction. Et de fait, les feuilles allongées et arrondies de l’obione évoquent celles du légume oublié aux tiges charnues (Portulaca oleracea) qui revient envahir certains jardins.

Dès mon arrivée sur ces champs sauvages, je fais ample moisson de ses feuilles faciles à récolter, qui accompagnent souvent dans mon panier les jeunes tiges de salicorne, sa cousine et voisine, car les deux partagent les mêmes lieux. L’obione, si elle me paraît moins délectable que les « cornes salées », présente en revanche un avantage non négligeable : elle peut se récolter toute l’année, ce qui est rare parmi les végétaux. Il m’arrive de hacher ses feuilles crues et de les mêler à mes salades, qu’il est alors inutile de saler, puisqu’elles regorgent de...

chlorure de sodium. Mais le plus souvent, je les fais cuire, à la vapeur ou à la poêle, selon les jours. Pour les moments festifs, elles se prêtent même à des préparations plus élaborées : par exemple, j’en farcis des gougères ou j’en fais des soufflés. Leur saveur agréable permet un large éventail de recettes.

Herbier

L’obione (Halimione portulacoides) est un sous-­arbrisseau rampant de 15 à 60 cm, vivant en colonies. Ses tiges ligneuses, très ramifiées, sont couchées sur le sol, ancrées par des racines adventives, et portent des rameaux redressés. Les feuilles sont opposées, avec un limbe ovale allongé, atténué en pétiole à la base. Elles sont entières, épaisses et presque charnues, d’un blanc argenté sur les deux faces. Les très petites fleurs, jaunâtres, paraissent de juillet à octobre. Elles sont réunies en groupes formant des épis interrompus situés à l’aisselle des feuilles supérieures et à l’extrémité des rameaux. Les fruits, ovoïdes, sont enfermés dans le calice persistant qui se gonfle, renfermant une seule graine rousse. L’obione est répandue sur le littoral de la Manche, de l’Atlantique et de la Méditerranée, en Europe, en Afrique du Nord et dans l’ouest de l’Asie. Trois autres espèces se rencontrent en Europe. L’Halimione pedunculata, la plus courante dans nos régions, est présente sur le littoral de la mer du Nord et de la Manche jusqu’en baie de Somme. Il s’agit d’une plante annuelle à tiges dressées et à feuilles alternes. Elle est également comestible.

J’ai parlé plus haut des remarquables facultés d’adaptation de ces plantes maritimes. Sans doute est-il utile d’en dire davantage à ce sujet, et pour cela d’entrer un peu dans l’intimité des végétaux. Les cellules de ces organismes chlorophylliens sont nécessairement gorgées d’eau, indispensable à la plupart des processus vitaux. Elle circule par osmose à travers les parois des cellules et se dirige vers les endroits les plus chargés en ions – atomes ou molécules chargés électriquement. Lorsque le milieu extérieur à la cellule est plus concentré en ions que l’intérieur de cette dernière, elle perd son eau et se plasmolyse (la plante fane). Certaines espèces ont su s’adapter aux terrains saturés en sel en séquestrant le chlorure de sodium dans des structures où il ne peut interférer avec leur métabolisme. Elles se rencontrent tout particulièrement dans la famille des amaranthacées. Outre l’obione et les salicornes, c’est le cas de certaines arroches et des soudes qui vivent sur le littoral et se rencontrent aussi à proximité des sources salées de l’intérieur des terres, comme dans la vallée de la Seille, en Moselle. En Asie centrale et en Amérique du Nord et du Sud s’étendent de vastes étendues salées, plus ou moins désertiques, que colonisent çà et là certains membres de cette intéressante famille. Ces plantes sont dites « halophiles », ce qui signifie en grec « qui aiment le sel » ou, plus exactement, qui parviennent à le supporter !

L’aspect de l’obione est suffisamment caractéristique pour que, en dehors du genre, on ne puisse la confondre avec d’autres plantes. On la prend pourtant parfois pour l’arroche hastée (Atriplex hastata), qui pousse également sur le littoral, mais les feuilles de cette autre cousine possèdent une forme triangulaire et sont moins épaisses. C’est d’ailleurs également une très bonne plante comestible.

Recette sauvage : Gougères d’obione

Ingrédients 25 cl d’eau • 75 g de beurre • 1 pincée de sel • 150 g de farine • 4 œufs • 150 g de fromage (gruyère ou comté) râpé • 500 g de feuilles d’obione.

  1. Dans une casserole, faites bouillir l’eau, le beurre et le sel.
  2. Une fois le beurre fondu, ajoutez la farine d’un seul coup. Baissez le feu et desséchez la pâte en remuant énergiquement jusqu’à ce qu’elle se détache des parois.
  3. Arrêtez le feu et lorsque la pâte a refroidi, incorporez les œufs un à un, en mélangeant bien à la spatule. Ajoutez la moitié du fromage râpé.
  4. Formez de petites boules sur une plaque beurrée, enfournez à 210 °C, jusqu’à ce que les gougères soient dorées et gonflées.
  5. Faites cuire les feuilles d’obione à la vapeur, puis hachez-les et mélangez-les, chaudes, avec le reste du fromage.
  6. Découpez le sommet des gougères et farcissez-les d’obione hachée. Replacez les calottes et réchauffez au four.
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