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Des jeunes médecins se forment en phytothérapie

Phytothérapie

Chaque année, de moins en moins de jeunes internes choisissent la médecine générale. Une crise des vocations au moment où la société a tant besoin de santé de proximité. Et si une médecine, alliant l'allopathie et à la phyto-aromathérapie, était une réponse ? Rencontre avec des jeunes praticiens qui, pour dynamiser leur pratique médicale, misent sur des alternatives.

Lorsqu'elle a ouvert son diplôme ­universitaire (DU) de phyto et d'aromathérapie à la faculté de médecine de Nice en septembre dernier, Pascale Gélis-Imbert n'imaginait pas être submergée de demandes : « Les 40 places ont été prises d'assaut tout de suite et j'ai dû panacher entre médecins, pharmaciens, infirmières et aides-soignantes pour équilibrer cette première promotion. J'en ai déjà 40 autres qui attendent pour intégrer l'année prochaine dont de ­nombreux jeunes médecins. » Une ­tendance ­observée aussi dans le diplôme interuniversitaire (DIU) de phyto-­aromathérapie de Toulouse-Limoges où l'on compte actuelle­ment six médecins généralistes ou spécialistes sur 30 étudiants alors qu'ils étaient à peine un ou deux les années précédentes. Une proportion qui monte même à 40 % dans le DU d'aromathérapie clinique de Dijon. Sans compter tous ceux qui se forment dans des filières privées ou étrangères. Quelles motivations poussent donc ces jeunes praticiens en médecine à se tourner vers des approches thérapeutiques naturelles, bien loin de leur cursus classique ? Pauline Chaerle finit sa dernière année de médecine et en parallèle elle vient de commencer le DU de phyto-aromathérapie à Nice : « J'ai pris conscience à la fin de mon cursus médical que les bénéfices de certains médicaments allopathiques étaient beaucoup plus limités que ce que j'imaginais. Pour mes patients, je souhaite des solutions efficaces et moins toxiques sur le long terme, ce que rend possible la phyto-aromathérapie qui peut agir autant sur le terrain que sur les infections aiguës ». Dans le même DU, son confrère Julien, médecin généraliste et homéopathe depuis six ans est sur la même ligne : « Dire aux patients : “vous avez mal, prenez cet antalgique” ce n'est pas une solution ! On nous demande de limiter le nombre de médicaments prescrits à cause des effets secondaires, mais c'est difficile de trouver des alternatives en allopathie à proposer aux patients. De plus, la faculté nous bassine avec l'Evidence-based medicine, (la médecine basée sur les preuves), sans aborder aucune autre approche. On nous formate ! Cette formation en phytothérapie m'ouvre vraiment d'autres ­perspectives pour mes consultations. »

Neuf années de formation et rien sur la phyto

Les études de médecine en France durent au minimum neuf années après le bac, voire dix à douze en fonction des spécialités. À ce jour, aucune initiation ou sensibilisation à la phytothérapie, l'aromathérapie ou à la pharmacopée chinoise n'est enseignée dans ce cursus. Une mission d'information sur le développement de l'herboristerie au Sénat a bien déposé une proposition en ce sens en 2018, mais rien ne bouge dans les facultés. Et pourtant la demande est là. Sinon comment expliquer que des jeunes médecins ayant à peine terminé leurs longues années d'école, s'inscrivent aussitôt à des formations de phyto-aromathérapie. Si ce n'est pour combler un manque ?

Des médicaments issus des plantes

Il est vrai que le cursus classique d'études de médecine générale ou spécialisée n'aborde toujours pas la phytothérapie ou ­aromathérapie, et ce même si 70 % des médicaments de la pharmacopée viennent des plantes… Une approche presque encore taboue. La preuve, Julien et Pauline osent à peine dire qu'ils suivent ce DU à des confrères qui les prennent pour des « originaux ». C'est aussi ce qu'a entendu Marine Crest, installée à ­Marseille comme généraliste, quand elle s'est intéressée à d'autres thérapeutiques : « Parce que je me suis formée à la phyto-aromathérapie et en micronutrition, des confrères m'ont dit “Tu as vrillé ou quoi ?” Mais aujourd'hui les mêmes me demandent où j'ai fait mes formations, car ils me voient limiter les effets secondaires des médicaments grâce aux plantes ou traiter une infection virale avec des huiles essentielles. Je suis dans une quête professionnelle enthousiasmante. »

Témoignage

Marine Crest est installée à Marseille depuis cinq ans comme médecin généraliste. La découverte des thérapeutiques naturelles a bouleversé sa pratique.

« J'ai découvert un immense champ des possibles...

J'ai suivi un parcours hospitalier classique de médecine à Paris-V. Mais après mon premier jour en cabinet libéral, j'ai compris que si je me contentais de soigner les symptômes avec mon savoir appris en faculté sans traiter la cause, je ne m'épanouirai pas ! Il existait forcément autre chose pour soigner de façon pérenne… J'ai alors suivi la formation de Dominique Baudoux en phyto et aromathérapie, en gemmothérapie, puis une autre en micronutrition à Dijon. Et là, ce fut une révélation. Mais pourquoi ne nous apprend-on pas ça à la fac ? Il y a comme une peur et un tabou face aux autres médecines… À présent, ce qui me passionne c'est de faire de la prévention avec mes patients, de restaurer leur paroi digestive et leur microbiote, car je sais combien c'est essentiel. Je prescris toujours des médicaments allopathiques. Mais j'ai pris l'habitude, par exemple, d'associer des antibiotiques avec des probiotiques et de l'huile essentielle d'origan. Celle-ci augmente l'efficacité des antibiotiques tout en réduisant la résistance des bactéries. J'ai découvert un immense champ des possibles en combinant ces différentes approches pour soigner autant les affections hivernales, que l'immunité ou l'oxydation cellulaire à l'origine du vieillissement. Chaque jour, j'essaie de proposer des protocoles sur mesure et de me réinventer professionnellement, en traitant les causes plutôt que les symptômes...»

Des compétences qui permettent aujourd'hui à ces médecins de proposer une autre approche de traitement pour les virus, y compris le Sars-CoV-2 , ou pour agir sur le système immunitaire ou le microbiote, des sphères délaissées par la médecine médicamenteuse. Ces praticiens, biberonnés à la médecine par les preuves, mettent en avant les nombreuses études scientifiques démontrant l'efficacité des plantes et des huiles essentielles. N'en déplaisent à certaines instances officielles comme l'Agence nationale de sécurité ­sanitaire de l'alimentation, de ­l'environnement et du travail (Anses) qui avait mis en garde en avril dernier contre les effets « perturbateurs sur l'immunité » de certaines plantes anti-­inflammatoires. Un avis démonté par les médecins phyto­thérapeutes Jean-Michel Morel et Éric Lorrain. Ces pionniers ainsi qu'une littérature scientifique étayée en matière de phyto et aromathérapie sont autant de socles d'appui pour leurs jeunes confrères, en quête d'une nouvelle manière d'exercer l'art ­d'Hippocrate. Comme Laure Martinat, interne en anesthésie et réanimation, qui a suivi un ­parcours atypique de double cursus en naturopathie et en ­médecine. Aujourd'hui, si elle est ravie d'avoir cette double compétence, elle n'est pas sûre qu'au niveau hospitalier en France il y ait l'espace pour utiliser cette approche : « Il faudrait l'envie de commencer des projets et avoir des moyens car les médecines naturelles sont de plus en plus déremboursées. Et pourtant, il serait ­intéressant d'utiliser l'huile essentielle de ­gingembre comme anti-nauséeux post­opératoire, la passiflore pour gérer l'anxiété avant une chirurgie ou du psyllium pour le ­transit. »

Huiles essentielles contre Covid-19

Si aucun traitement allopathique probant n'a été validé pour le moment concernant le Covid-19, « en phyto-aromathérapie et en micronutrition, nous avons des outils pour accompagner l'immunité, les réactions inflammatoires ainsi que les symptômes que l'on peut retrouver avec un virus qui donne un état grippal ou pseudo-grippal. Les huiles essentielles ont prouvé leur efficacité comme antivirales, antibactériennes, antisécrétoires et anti-inflammatoires. Les patients qui les utilisent constatent une diminution rapide des symptômes et une meilleure récupération physique par la suite », explique Marine Crest, médecin généraliste. À ses patients qui présentent ce type de symptômes sans nécessité d'hospitalisation, elle préconise d'associer des huiles essentielles de ravintsara, de laurier noble, de thym, d'origan avec une essence de citron pour protéger le foie. Peuvent s'y ajouter en phytothérapie, une alliance cyprès-échinacée-astragale avec du bourgeon de cassis en gemmothérapie. Sans oublier les incontournables vitamines C, D, zinc et le magnésium.

Une demande forte des patients

D'autant que ces solutions sont réclamées par des patients qui utilisent de plus en plus des thérapeutiques naturelles sans oser le dire à leurs médecins. Ce qui peut poser d'ailleurs des problèmes d'interactions négatives entre plantes et médicaments chimiques. Or, ces médecins ont à cœur d'écouter leurs patients en demande d'une allopathie moins lourde en effets délétères et de protocoles plus naturels. Au lieu de sous-estimer les propriétés curatives des plantes médicinales et d'opposer ­médecine classique et phyto-aromathérapie, ils utilisent la puissance des plantes dans leurs ­différentes formes pour soigner les ­pathologies du ­quotidien. Et retrouvent ainsi du sens à exercer leur métier…

En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Plantes & Santé ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.
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