Dossier
Cultiver un rapport sensible au végétal (5/15)
Communication, plaisir et même attachement… De plus en plus de personnes envisagent de se rapprocher des plantes, des arbres en impliquant leur sensibilité, leur affect, leurs émotions. Rencontre avec ces paysans, herboristes, écologues, thérapeutes… qui, tout en développant une alliance profonde avec le vivant, ouvrent de nouvelles voies de connaissance.
Trois questions à… Patricia Lariguet, paysanne herboriste
Forte de ses convictions écologiques, cette chercheuse en biologie moléculaire cultive ses plantes dans sa propre ferme, pour les transformer en produits de bien-être.
P&S Votre changement de carrière vous a-t-il permis de comprendre les végétaux autrement ?
Patricia Lariguet Les années de laboratoire n’ont jamais rompu mon enchantement pour le végétal, mais l’ont affiné. Les plantes perçoivent tout : une ombre passe et leurs chloroplastes (la partie des cellules qui joue un rôle dans la captation de la lumière, ndlr) bougent dans la cellule, se réorientent. Observer cela est magique et fascinant. Les plantes m’ont permis de vivre, au sens premier...
. Elles m’ont aussi sauvé la vie, à deux reprises. Alitée huit mois à cause d’une spondylarthrite ankylosante, il m’a suffi d’un seul mois en nature à marcher, me coucher sur la mousse pour me passer des traitements et m’éviter l’opération.
P&S Dans votre travail, qu’est-ce que ce rapport aux plantes a changé ?
P. L. Lorsque j’ai créé ma ferme, je m’acharnais à cultiver des plantes qui ne s’adaptent pas à la culture, comme le millepertuis. J’avais beau faire, il semblait être fait pour être libre ! Cultiver demande des efforts alors que la plupart des plantes sont en meilleure santé dans la nature. Une étude menée dans le Queyras a ainsi montré que des plantes sauvages abritaient des bactéries pathogènes pour elles, mais qui ne les tuaient pas car leur microbiote s’était enrichi de toute la biodiversité environnante. Après un burn-out récent, cela m’a fait réfléchir et je ne pratique plus aujourd’hui que la cueillette sauvage.
P&S Y a-t-il une plante avec laquelle vous avez développé un lien particulier ?
P. L. La rose de Damas, à l’odeur fine et sublime. Et les fleurs de calendula, qui me mettent de bonne humeur et m’inspirent en me montrant qu’il est possible de pousser partout, même à travers le goudron